Vecteur culturel et politique officiel des démocrates dans la course aux prochaines élections présidentielles, la méga-pop Star de 34 ans, Taylor Swift est devenue omniprésente. Une saturation des ondes rarement connue. Figure incontournable de l’Entertainment made in USA, Taylor Swift est devenue le fer de lance du soft power, concept popularisé ces dernières années par le politologue Joseph Nye. Le soft power a été un élément fort au service des Etats- Unis depuis leur création, bien avant qu’ils ne deviennent une puissance mondiale reconnue. Si ce concept a été utile pour comprendre le contexte dans lequel intervient la diplomatie publique, il est intéressant de voir comment le soft power contribue à l’amélioration de l’image des politiques et à leur rayonnement sur le plan des affaires intérieures.
A l’approche des élections de novembre 2024, la surexposition médiatique de Taylor Swift n’a pas vraiment l’effet d’aubaine escompté.
Présentée comme une militante écologique, ses usages du jet-privé sont pointés du doigt sur les réseaux sociaux, notamment pour rendre visite à son compagnon à Kansas City, Travis Kelce, joueur de football américain, soit une moyenne de 4 tonnes d’émissions par an. Humanitaire, alliée des groupes opprimés et marginalisés, la chanteuse n’a aucun problème à se produire en 2019 à Shangaï, lors d’un concert annuel destiné à accroître la visibilité d’Alibaba, le détaillant chinois de commerce en ligne le plus puissant. Féministe acharnée, elle reste silencieuse sur les agressions sexuelles commises par les terroristes du Hamas lors des terribles attaques du 7 octobre en Israël et de la séquestration des femmes juives à Gaza souligne David NG, dans son article du 26 décembre 2023 (source : Breitbart). De même souligne-t-il, elle a fait de l’activisme LGBTQ, le centre de son engagement médiatico-politique, mais elle a autorisé la diffusion du film de son concert dans un pays ou l’homosexualité est illégale.
Figure culturelle construite par l’establishment américain, Taylor Swift est également mise en accusation dans sa vie personnelle. Vivek Ramaswamy, premier soutien de Donald Trump, s’est exprimé sur le couple qu’elle forme avec Travis Kelce, estimant qu’il s’agit d’un « couple artificiellement construit » par l’élite politico-médique et culturelle. Sa romance avec la star des Kansas City Chiefs a apporté à la ligue 331 millions de dollars en valeur de produits dérivés et de publicité, notamment sur les réseaux sociaux, comme l’a détaillé Breitbart News.
Taylor Swift, le soutien majeur de la campagne de Joe Biden ?
Nombreux observateurs journalistes politiques décrivent la pop star Taylor Swift comme principal levier et soutien pour la campagne présidentielle de Joe Biden. Qu’en est-il réellement ? Un récent sondage montre que son influence politique potentielle serait quasi-nulle. Dans leur rapport publié lundi 29 janvier 2024, dans le New York Times, Reid J. Epstein, Lisa Lerer, Katie Gleuck et Katie Rodgers décrivent la stratégie de l’écosystème Biden pour les prochaines élections présidentielles américaines : enrôler des célébrités, stars, média sociaux et d’anciens présidents démocrates. Cette étude intervient alors que l’ancien Président Donald Trump devance de 5 % au niveau national (sondage établi par RealClearPollig) et que la côte de popularité de l’actuel président américain est historiquement au plus bas.
Selon ce rapport, la chanteuse pop figure au premier rang des soutiens potentiels de la campagne de Joe Biden. La collecte de fonds dans le sud de la Californie en décembre dernier a été l’occasion pour la galaxie Biden de rencontrer des influenceurs et de leur proposer du contenu et d’autres « éléments de langage favorables » à l’actuel Président américain. Etait également prévue, comme l’a rapporté NBC News, d’organiser une collecte de fonds avec deux anciens présidents démocrates, Bill Clinton et Barack Obama.
La cible prioritaire pour l’équipe Biden ? Taylor Swift, la pop-star de 34 ans, qui peut déplacer des millions de partisans avec un seul post sur Instagram et relancer l’économie locale avec ses concerts. Son soutien à l’actuel Président Biden en 2020 et un seul de ses post l’an dernier sur Instagram a entraîné l’enregistrement de 35 000 nouvelles inscriptions sur les listes électorales américaines. Les appels à lever des fonds en faveur de la campagne de Joe Biden par l’artiste pop pourraient valoir de millions de dollars l’équipe démocrate. La prochaine tournée de l’artiste aux Etats-Unis, « Eras Tour » aura lieu quelques semaines avant l’élection.
Cependant, un récent sondage Redfield & Wilton tend à modérer les ardeurs de l’équipe de Joe Biden : l’influence de l’artiste auprès des électeurs américains dits « flottants » est toute relative. Ce sondage réalisé pour Newsweek fin janvier dernier, révèle que 18% des 1 500 électeurs interrogés déclarent que le soutien de Mme Swift les rendrait « plus susceptibles », à « différents degrés » de soutenir un candidat en particulier. Toutefois, près de 17 % des personnes interrogées déclarent que le soutien de l’artiste en faveur de tel candidat serait démobilisateur pour elles. Qui plus est, la grande majorité du panel n’est pas fan de Taylor Swift. Sur l’ensemble des personnes interrogées, 45% ont déclaré faire partie de la « fan base » de la pop-star contre 54%, qui ont déclaré ne pas l’être (selon la rédactrice en chef de Newsweek, Katherine Fung). La marge d’erreur de l’enquête serait de plus ou moins 2,53%.
Le rapport du Times intervient également à l’heure où les images modifiées par l’IA, sexuellement explicites, de l’artiste ont affolé la toile et l’administration Biden.
La consécration de Taylor Swift aux Grammy Awards 2024 au cœur d’une polémique identitaire radicale
La 66ème édition des Grammy Awards a été l’occasion d’une sortie fulgurante de l’artiste JAY-Z, qui s’est vu remettre le « Dr. Dre global impact Award », un prix qui vise à récompenser son influence signifiante et durable dans l’industrie musicale américaine.
Ce dernier a utilisé la scène des Grammy Awards pour fustiger la Recording Academy, qui gère les Grammys, pour son manque de considération et « mauvais traitement » à l’égard des artistes noirs : « nous voulons que vous fassiez les choses correctement ». Il a évoqué sa femme, Beyoncé, qui a remporté le plus grand nombre de Grammys, mais qui n’a jamais remporté le prix pour l’album de l’année. « Pensez-y » dit-il en fronçant les sourcils. Tenant la main de sa fille Blue Ivy, pour le soutenir, JAY- Z a exhorté les artistes noirs qui auraient été « négligés » par l’institution à « persévérer jusqu’à ce qu’ils décernent toutes les récompenses que vous estimez mériter ». Ce discours revendicatif a été l’occasion de mettre en exergue la division ethnique et raciale qui affecte l’industrie musicale américaine : ces dernières années, plusieurs grands artistes afro-américains ont choisi de boycotter les Grammys, en refusant de soumettre leur musique à « une caste » qui maltraiterait le hip-hop et le R&B, notamment dans les catégories de prix les plus importantes. L’arrestation largement relayée sur les réseaux sociaux pour coups et blessures du rappeur Killer- Mike, activiste politique, en marge de la cérémonie, après avoir reçu ses 3 prix, marque une scission profonde et durable entre les Grammys et les artistes de la scène hip-hop/ R& B américains. JAY-Z est revenu à sa table, orientant sa statuette noire, face caméra, et en y versant deux doigts de cognac D’USSÉ, l’une des marques de spiritueux les plus respectées au monde qu’il a bu tranquillement. Pour rappel, l’an dernier, JAY-Z a accepté un accord de plusieurs milliards de dollars avec Bacardi concernant la valorisation de D’USSÉ, qui intervient après leur procès houleux sur le cognac premium.
Les Grammys awards reposent sur le vote de plus de 11 000 professionnels de la musique, interprètes, auteurs-compositeurs, producteurs et les collaborateurs membres de la Recording academy,qui participent aux enregistrements des artistes. Dans le passé, des comités anonymes avaient le pouvoir de s’opposer à la sélection de certains candidats par les membres de la Recording academy. De nombreuses controverses ont permis la dissolution de ces comités anonymes bien que l’academie s’arroge le droit d’exclure certains artistes.
Après avoir remporté le premier prix de la soirée, celui du meilleur album pop vocal, pour « Midnight », Taylor Swift a profité de la scène de Grammys pour faire la promotion de la sortie de son nouvel album « the Tortured Poets Department », en avril prochain. C’est la quatrième fois que Taylor Swift remporte le prix le plus important, un record.
Selon le magazine new-yorkais, Vulture, la victoire de Taylor Swift aux Grammy Awards, pour l’album de l’année, signifie « qu’elle a maintenant plus de victoires dans cette catégorie, que toutes les femmes noires réunies ». Seules 3 femmes afro-américaines ont remporté un prix dans cette prestigieuse catégorie, Nathalie Cole en 1992, Whitney Houston en 1994 et Lauryn Hill en 1999.
Diplômée de la Business School de La Rochelle (Excelia – Bachelor Communication et Stratégies Digitales) et du CELSA – Sorbonne Université, Angélique Bouchard, 25 ans, est titulaire d’un Master 2 de recherche, spécialisation « Géopolitique des médias ». Elle est journaliste indépendante et travaille pour de nombreux médias. Elle est en charge des grands entretiens pour Le Dialogue.