Tribune de Julien Aubert
Le chantage atomique de Vladimir Poutine, assorti de l’envoi d’un missile Orechnik, a accru la perception de la dangerosité du conflit en Ukraine (et son impact sur la stabilité mondiale).
Pourtant, ce sont deux autres détails dans l’actualité internationale qui ont attiré mon attention. Le premier concerne la Syrie : Alep est tombé aux mains des islamistes. Le second concerne la Corée du Sud : le président coréen a décrété la loi martiale. Voici deux (nouveaux) pays dans la tourmente dont on pourrait penser qu’ils sont disjoints du problème russe. Bien au contraire : ils sont des dominos d’une perturbation mondiale plus large dont la Russie est le centre.
En effet, l’armée de Bachar El-Assad a été surprise par une offensive éclair menée par HTS, l’ex branche locale d’Al-Quaida, lancée le 28 novembre dernier. Al Assad se trouvait chez son allié russe la veille, le même qui lui avait permis en 2020 de stabiliser cette région avec un cessez-le-feu. HTS profite de l’affaiblissement du géant russe, occupé en Ukraine, et de la guerre au Proche-Orient, Israël bombardant les installations syriennes. Il y a donc ici une imbrication entre front ukrainien, front syrien et front israélien. D’ailleurs, l’attaque d’HTS a été conduite… le jour du cessez-le-feu israélien.
En Corée du Sud, le président Yoon Suk Yeol a quant à lui déclaré vouloir « protéger » le pays « de la menace des forces communistes nord-coréennes » et « éradiquer les abjectes forces antiétatiques pro-nord-coréennes ». Le Parlement s’est rebellé mais l’armée semble être aux côtés du président. Yoon Suk Yeol, dont le parti le PPP était en pleine guerre budgétaire avec le Parti Démocrate, instrumentalise sans doute en partie la peur du voisin nord-coréen mais il y a un fond de vérité dans sa démarche.
Il y a un mois, la Corée du Sud s’était en effet inquiétée de la présence de soldats nord-coréens en Russie. Le ministère des affaires étrangères sud-coréen avait convoqué l’ambassadeur russe à Séoul, lui demandant un retrait immédiat des troupes envoyées par Pyongyang. Tout simplement, Séoul craint d’avoir à ses portes des troupes formées par les russes et ayant acquis une expérience sur le terrain.
On le voit le bras-de-fer engagé en Ukraine est en train de métastaser un peu partout dans le monde. En trouvant en Pyongyang un allié militaire, Moscou a réveillé la peur en Asie d’un conflit régional. En allégeant ses capacités militaires au Proche-Orient, Moscou laisse la place à des acteurs terroristes qui pourraient de nouveau planifier des attaques contre les pays occidentaux et qui profitent aussi des dégâts infligés par Tsahal à l’Iran et la Syrie.
On pourrait rajouter à ce dernier exemple l’éviction de la France en Afrique – Tchad et Sénégal – dans laquelle, la Russie joue un rôle trouble. Si la vente d’armes constitue un levier privilégié de l’influence russe, l’activisme en ancienne Françafrique a d’autres ressorts, comme celui de conserver le soutien de ces États à l’ONU lorsque les pays occidentaux cherchent à faire condamner la Russie à propos de l’Ukraine. Or, le problème est que les bases françaises ont un rôle particulièrement utile pour l’endiguement de la menace islamiste. Là encore le conflit russo-occidental en Ukraine va par ricochet affaiblir les protections mises en place contre le terrorisme.
Cette suppuration du conflit ukrainien est dangereuse pour la stabilité mondiale car elle lie entre elles des zones à priori disjointes, avec le risque de créer des enchaînements non maîtrisés et d’exporter la conflictualité. Elle pourrait à terme faire renaître l’islamisme djihadiste, comme une ombre portée du conflit ukrainien.
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