Les États-Unis et la déclaration de l’OMC sur la Russie : Un signal de désengagement ou une nouvelle stratégie ?

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Décision des États-Unis sur la déclaration de l’OMC concernant la Russie
RéalisationLe Lab Le Diplo

Par Giuseppe Gagliano, Président du Centro Studi Strategici Carlo De Cristoforis (Côme, Italie). 

La récente décision des États-Unis de ne pas signer la déclaration de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) condamnant l’agression russe contre l’Ukraine a suscité une vague d’interprétations parmi les observateurs internationaux. Alors que 45 pays, dont l’Ukraine et plusieurs alliés occidentaux, ont adhéré au document, Washington a choisi une approche plus nuancée, évitant de s’associer à un acte de condamnation formelle.

Ce choix s’inscrit dans un contexte plus large de réajustement de la politique étrangère américaine, marqué par un langage plus prudent à l’égard de la Russie et un désengagement progressif de certaines des positions adoptées sous la présidence Biden. Ce n’est pas un hasard si, quelques jours auparavant, les États-Unis ont voté contre une résolution de l’Assemblée générale des Nations unies qui désignait explicitement la Russie comme agresseur, préférant un document alternatif qui, tout en condamnant la guerre, évitait un ton trop tranché.

Un choix tactique ou un nouveau cap politique ?

Le refus de soutenir la déclaration de l’OMC n’est pas un événement isolé. Ces derniers mois, le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, et le conseiller à la sécurité nationale, Mike Waltz, ont évité de qualifier la Russie « d’agresseur » dans leurs déclarations publiques. Le langage utilisé par Donald Trump, probable candidat aux élections présidentielles de 2024, évolue également : il s’est abstenu de qualifier Vladimir Poutine de « dictateur » et a même évoqué la réadmission de la Russie au sein du G7, après son exclusion en 2014 à la suite de l’annexion de la Crimée.

La question clé est de savoir si cette stratégie traduit une volonté de Washington d’ouvrir des canaux de négociation avec Moscou ou s’il s’agit simplement d’un coup politique visant à se démarquer de l’administration Biden. Le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, a récemment déclaré que la levée ou l’assouplissement des sanctions pourrait être un élément du processus de négociation, marquant ainsi un changement potentiel par rapport à la ligne dure adoptée jusqu’à présent.

Impact sur les alliés occidentaux

Cette nouvelle approche américaine risque de provoquer des tensions avec les partenaires européens, en particulier la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, qui ont maintenu une position plus ferme face à Moscou. L’incident récent au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, où de nombreux diplomates européens ont quitté la salle pour protester contre l’intervention russe, démontre que le front occidental reste divisé.

L’Europe, déjà confrontée aux enjeux du réarmement et à une dépendance croissante à l’égard de l’OTAN, pourrait être amenée à reconsidérer son rôle stratégique. L’Italie, par exemple, a toujours suivi la ligne dictée par les États-Unis, mais dans un scénario où Washington adopte un ton plus pragmatique, elle pourrait envisager une approche plus autonome, éventuellement en coordination avec la France et l’Allemagne.

Répercussions économiques et géopolitiques

Sur le plan économique, la décision des États-Unis pourrait avoir des conséquences importantes sur les sanctions et les flux commerciaux. L’administration Trump envisage deux scénarios : l’un prévoit un assouplissement des sanctions pour favoriser un éventuel accord de paix, l’autre vise un durcissement pour accroître la pression sur Moscou. Ce dernier scénario semble toutefois moins probable à la lumière des récents développements.

De son côté, le Kremlin a accueilli favorablement ce changement de ton américain, le qualifiant de position « plus équilibrée ». Si cette stratégie se confirmait, nous pourrions assister à une phase de dialogue entre Washington et Moscou, avec des implications significatives sur le conflit en Ukraine et sur l’équilibre géopolitique mondial.

En conclusion, l’absence de soutien à la déclaration de l’OMC n’est pas un simple incident diplomatique, mais le signe d’un possible changement de cap dans la politique étrangère américaine. Si les États-Unis cherchent réellement à reformuler leur approche vis-à-vis de la Russie, la prochaine étape sera déterminante : une ouverture aux négociations pourrait redéfinir l’équilibre international, tandis qu’une nouvelle ambiguïté risquerait d’affaiblir la position occidentale face à Moscou.

Reste à savoir si ce choix est le prélude à une stratégie plus pragmatique ou s’il s’agit seulement d’une manœuvre tactique en vue des élections présidentielles. En attendant, l’Europe devra décider si elle doit s’aligner sur cette nouvelle orientation américaine ou maintenir une ligne plus ferme contre la Russie.

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