Eurovision 2024, un concours d’un nouveau « genre »

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Montage photo Le Diplomate (DR)

Ceux qui pensaient que le wokisme était un phénomène de mode en bout de course, une idéologie en perte de vitesse, ou bien un mouvement révolutionnaire qui allait rapidement se normaliser, en sont pour leurs frais. Leurs convictions se sont arrêtées brutalement ce samedi 11 mai 2024. Le concours de l’Eurovision a été sans équivoque. Le wokisme s’est imposé avec force en ayant fait la démonstration de son influence et de son emprise. Le concours de l’Eurovision est l’un des événements les plus médiatisés en Europe. L’année passée, le nombre de personnes qui l’ont suivi était estimé à 162 millions. Autant dire que ce concours est une formidable opportunité pour faire passer des messages. Soyons clairs, le premier vainqueur de ce concours n’est pas un artiste, mais bien une idéologie

N’ayant pas peur des mots, d’autant plus quand il s’agit de mots s’inscrivant totalement dans la rhétorique woke. Ce n’est qu’un juste retour du bâton. L’idéologie woke est bien ancrée dans les structures et les rouages des sociétés occidentales. Elle est dorénavant structurelle. Rien ne semble lui échapper, elle est omniprésente : défilés de mode, films, séries télé, publicités, concours de beauté, cérémonies diverses et variées (festival de Cannes, Oscars, Césars, Molières) et bien entendu, les concours de la chanson. Ce ne sont que des exemples parmi les plus visibles et audibles

La négation du sexe biologique est présentée comme le nouveau symbole de la liberté et de l’épanouissement individuel

Formidable, n’est-ce pas ? Il y a au moins 160 millions de personnes qui savent maintenant ce qu’est la non-binarité ! Rien de plus pédagogique que le concours de l’Eurovision quand il s’agit d’éveiller la conscience des peuples sur les bienfaits du progressisme. Eh oui, il n’aura échappé à personne que le vainqueur, ce jeune Suisse âgé de 24 ans du nom de Nemo, se déclare non-binaire. D’ailleurs, sa chanson, « the code », raconte son parcours et son long cheminement avant de découvrir sa non-binarité salvatrice et émancipatrice. Mais, le bonheur était au bout de son long et douloureux processus de questionnement et de remise en question. L’histoire est belle et se finit bien. Que faire de plus ou de mieux pour promouvoir la théorie du genre ?

Théorie que l’on doit, entre autres, à Judith Butler, philosophe américaine, théoricienne du genre, véritable égérie pour la communauté LGBTQIA+ et pour les néo-féministes dernier cri, c’est-à-dire celles qui considèrent que la lutte des personnes transgenres ou non-binaires prévaut sur celle des femmes biologiques. Le concours de l’Eurovision 2024 a été gagné en réalité par Nemo et Judith Butler qui a, au passage, suscité récemment la polémique en qualifiant les attaques du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, d’acte de résistance.

Avec la théorie du genre, le genre n’a aucun rapport avec le sexe biologique attribué à la naissance. Les différences entre les hommes et les femmes ne sont pas fondées sur la nature. Elles font l’objet d’une construction culturelle et sociale. Chacun peut se définir, ou plus exactement se déterminer, homme ou femme selon son ressenti. Judith Butler introduit également le concept de fluidité du genre où ce dernier est en mouvement permanent. Il se construit, se déconstruit, puis se reconstruit, etc. Le genre n’est ni binaire, ni figé. Il est évolutif et multiple. En d’autres termes, on peut se sentir homme aujourd’hui et femme demain. On peut aussi se sentir ni homme, ni femme. On peut se sentir un peu des deux, etc. C’est cela être non-binaire. L’heure est dorénavant à l’auto-détermination ! Au diable la biologie et les normes ! L’individu est ce qu’il veut, point à la ligne ! L’auto-détermination du genre permet de s’affranchir de l’oppression des catégories et d’apporter un remède au mal-être des individus.

Force est de constater qu’il est de bon ton maintenant, pour les artistes, de mettre sur le devant de la scène leurs questionnements ou leurs revendications sur le genre, en abhorrant maquillages et costumes mêlant féminité et masculinité. La tendance n’est pas à la binarité, bien au contraire. Les personnes cisgenres (pas de différence entre le genre attribué à la naissance et celui qui est revendiqué) n’ont plus la cote et ceci, indépendamment de leur orientation sexuelle. Maintenant, pour les idéologues du genre, les hétérosexuels, les gays ou les lesbiennes sont logés à la même enseigne. Une partie de la communauté LGBTQIA+ est désormais has been.

La sacralisation de ce qui est laid, vulgaire, médiocre et transgressif

Le concours de l’Eurovision 2024 restera un bon cru pour la déconstruction des valeurs traditionnelles. Bien évidemment, il y a une part de subjectivité importante dans ce qui peut nous paraître remarquable ou admirable à bien des égards. Néanmoins, le concours de l’Eurovision de la chanson ne se résume pas à un simple spectacle. C’est un événement majeur, parmi les plus médiatisés en Europe, qui vise un large public, y compris les familles avec enfants. Ne devrait-il pas exister un principe de prudence pour éviter de heurter ou choquer les plus jeunes ? Une plus grande considération pour la pudeur aurait été appréciée.

Que penser du groupe représentant la Finlande, où l’on a pu voir l’un des membres, ancien drag-queen, se faisant appeler Windows95Man, apparaître dans un œuf vêtu d’un petit débardeur blanc, sans pantalon ? Le tout dans une chorégraphie faisant penser à un spectacle organisé par des enfants d’une école primaire, et de plus, marquée par des gestes plus que tendancieux. Il faut dire que le titre de la chanson « no rules » est évocateur. Que dire de la représentante de l’Irlande, Bambie Thug, qui se définit également comme une artiste non-binaire, et qui use d’une mise en scène et d’un symbolisme se situant entre le satanisme et la sorcellerie ? Artiste que la presse irlandaise surnomme « La sorcière ». On peut y voir une sorte de glorification du mal laissant dubitatif, et générant un certain malaise. Que dire de la jupe satinée ainsi que de la veste à plumes roses et rouges du lauréat ?

Sous couvert de la transgression, le mauvais goût est de mise. La beauté, l’élégance, le romantisme, le professionnalisme sont ringardisés, voire ostracisés. Place et gloire à la subversion !

Le wokisme s’impose plus qu’il ne convainc ! Il prospère par le politiquement correct et le conformisme

L’idéologie woke a étendu son influence à une vitesse hallucinante. Elle met en avant des causes nobles et, dans cet exemple, l’inclusivité et la diversité. Mais le but n’est pas que tous les individus soient traités de la même manière et bénéficient des mêmes droits. Non, le but est de déconstruire les normes et les valeurs traditionnelles, et d’en imposer de nouvelles. Le plus grand nombre doit s’aligner sur le plus petit nombre. Les marges passent au centre et le centre passe dans les marges. Le wokisme veut mettre tout le monde à son diapason. Peu importent les provocations et le déni de certaines évidences.

Il y a d’un côté, des personnes agissantes et influentes à tous les niveaux, et de l’autre, des personnes qui suivent par conformisme et cèdent sous la pression du politiquement correct. Les minorités sont par nature actives et la majorité, toujours par nature, est silencieuse et docile. Les personnes qui osent contredire l’idéologie woke sont vouées aux gémonies. Et c’est forcément dissuasif. Qu’est-ce qu’un homme et qu’est-ce qu’une femme ? Cette question, simple en apparence, mettrait dans l’embarras bon nombre de personnalités, notamment parmi le personnel politique. Les réponses pourraient être compromettantes. Ne parlons pas de questions trop « techniques » telles que : est-ce qu’un pénis peut être un organe féminin ou bien, est-ce que des hommes peuvent avoir des règles ? En décembre 2019, la chaîne d’information britannique Sky News titrait « un homme transgenre (femme biologique s’identifiant homme) accouche après utilisation d’un don de sperme féminin ». Il faut dire que le conjoint de cette personne qui avait accouchée était une femme transgenre. Peut-on faire mieux dans le domaine du politiquement correct ? Ah si, peut-être la présentation faite lors du JT d’un grand média français le lendemain de la compétition : « Le chanteur Suisse a remporté brillamment le concours, une prime à l’audace et au talent ! Une soirée qui aura tenu toutes ses promesses avec des paillettes, des artistes surprenants, des chansons entêtantes… ». Bref, le public doit se réjouir d’un tel beau spectacle !

Un clivage entre le vote des professionnels et celui du public, à la fois révélateur et encourageant pour la suite

Que ce soit pour Nemo ou pour la chanteuse israélienne, Eden Golan, des différences d’appréciation notables ont été remarquées entre les professionnels et le public.

En effet, si Nemo est arrivé premier, c’est bien grâce au vote des professionnels qui l’ont placé en tête avec 365 points. Le public a été beaucoup moins enthousiaste en le plaçant 5ème avec seulement 226 points. Quant à la chanteuse israélienne, elle a clairement été boudée par les professionnels en n’obtenant que 52 points. En revanche, elle a bénéficié d’un large soutien de la part du public qui lui a octroyé 323 points.

Le concours de l’Eurovision se veut apolitique, et le dire n’engage strictement en rien. Or, tout est politique. Ne pas le croire, c’est faire preuve d’une crédulité incommensurable. Les bons sentiments et les déclarations vertueuses n’y feront rien. Ce n’est pas tous les jours que l’opportunité de s’adresser au bas mot à 160 millions d’individus est donnée. Ce concours a été premièrement une formidable occasion de promouvoir une conception du genre où la binarité doit faire partie du passé. Il faut maintenant appréhender le genre dans toute sa diversité et sa richesse. Le bonheur serait dans le genre. Deuxièmement, nous avons assisté à une attaque en règle des valeurs traditionnelles, mais d’une manière assez subtile : elles ont été tout simplement absentes. De quoi les affaiblir forcément encore un peu plus.

Pourquoi de tels écarts dans les votes ? Se posent alors naturellement des questions autour des professionnels de ce concours. Comment sont-ils choisis ? Subissent-ils des influences ? Font-ils l’objet d’une pression particulière ? Sont-ils tout simplement des ardents défenseurs de cette idéologie, progressiste pour certains, subversive, vindicative ou plus précisément revancharde pour d’autres ? Des professionnels dont les noms ne sont communiqués qu’à l’issue du concours pour éviter, officiellement, toute pression et acte de corruption…

Le questionnement invite à la réflexion, et la réflexion amène à user de son sens critique, puis à faire valoir son libre arbitre. C’est l’étape indispensable pour s’affranchir d’un politiquement correct et d’un conformisme qui inhibent et anesthésient toute velléité de rébellion. Ce concours permettra sûrement de faire bouger les lignes car il a brillé par ses nombreuses provocations.

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