Le Sommet Russie-Afrique sonnera-t-il le glas de l’influence de l’Occident en Afrique ?

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Le deuxième sommet Russie-Afrique se tient au Forum Expo de Saint-Pétersbourg les 27 et 28 juillet 2023, avec la participation des dirigeants de la majorité des pays africains. 

De même, un Forum économique et humanitaire Russie-Afrique est organisé parallèlement et offre une plate-forme pour les réunions d’affaires et comprendra la bagatelle de plus de 30 tables rondes et des événements/réunions thématiques 

Pour mémoire, le sommet devait initialement avoir lieu à Addis-Abeba en octobre 2022, mais a été reporté par le président russe Vladimir Poutine en juillet dernier, probablement compte tenu de « l’Opération Spéciale » russe en l’Ukraine.

Le sommet reporté devait durer quatre jours, mais le 21 juin 2023, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a annoncé qu’il serait limité à deux en raison d’un « ajustement » de programme.

L’événement marque selon ses promoteurs « un premier pas sérieux vers le retour économique et politique en Afrique de la Russie », selon le vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhail Bogdanov le 19 juin 2023.

Quels sont les enjeux du Sommet Russie-Afrique ?

Les organisateurs, à l’instar de Roscongress, décrivent le sommet comme « l’événement le plus important dans les relations russo-africaines » ayant pour but de créer un « nouveau niveau de partenariat mutuellement bénéfique » entre la Russie et le continent.« L’objectif de l’événement est d’assurément de promouvoir les efforts visant à renforcer la coopération globale et équitable entre la Russie et les nations africaines dans tous les domaines de la société, y compris la politique, la sécurité, les relations économiques, la science et la technologie, ainsi que les sphères culturelles et humanitaires », tiennent à souligner les promoteurs de ce sommet.Cette grand-messe est à comparer avec d’autres sommets à l’instar d’”Afrique +1″ tels que le Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC), la TICAD du Japon et le sommet des dirigeants États-Unis-Afrique.Chacun sait que le premier sommet Russie-Afrique s’est tenu les 23 et 24 octobre à Sotchi 2019, une station balnéaire de la côte russe de la mer Noire. Tenue sous le slogan « Pour la paix, la sécurité et le développement », elle était coorganisée par le président Vladimir Poutine et le président égyptien Abdel Fatah al-Sissi.Quarante-cinq chefs d’État et deux vice-présidents africains étaient présents, ainsi que 109 ministres et les chefs de la Commission de l’Union africaine (UA), de la Banque africaine d’import-export et de plusieurs communautés économiques régionales.

Quid du Forum économique et humanitaire ?

Le premier Sommet Russie-Afrique s’est accompagné d’un Forum économique Russie-Afrique, à l’issue duquel 92 contrats et protocoles d’accord d’une valeur publiquement divulguée de 1 004 billions de roubles (11,5 milliards d’Euros) ont été signés Au bas mot, 569 réunions ont eu lieu au Forum, auquel ont assisté plus de 6 000 participants, dont 1 100 représentants d’entreprises internationales, environ 1 400 représentants d’entreprises russes, plus de 1 900 membres de délégations étrangères officielles et plus de 300 membres de délégations russes.Il a été décidé d’élargir l’édition 2023 du Forum pour y inclure un volet humanitaire. Il comprendra également une exposition à grande échelle et une plate-forme pour les réunions d’affaires.Ce Programme humanitaire promet d’être ambitieux, il est regroupé en quatre blocs thématiques :- La nouvelle économie mondiale. Il va sans dire que cela se concentrera sur l’expansion de la coopération commerciale entre la Russie et les pays africains- La Sécurité, à savoir examiner comment l’expérience de la Russie en matière de sécurité peut être bénéfique pour les pays africains ;- La Science et technologie. A ce titre, les thèmes clés seront la coopération industrielle en tant que moyen vers la souveraineté technologique et les technologies de pointe importantes pour le développement durable de l’Afrique.  Dans ce cadre on notera des sessions sur les technologies nucléaires, numériques et de santé ;Enfin les questions humanitaires et sociales qui couvriront la coopération dans les domaines de l’éducation, de la culture, des sports et de l’autonomisation des femmes et des jeunes.Mais on ne saurait oublier un forum des médias, une réunion des recteurs d’université et une table ronde des organes d’audit russes et africains.Il y aura aussi un forum des entreprises créatives, un forum sur la vie saine et un forum spécial de coopération entre les agences gouvernementales russes et africaines et les entreprises engagées dans l’industrie des métaux précieux.Les événements “viseront à renforcer globalement la coopération russo-africaine et visent à déterminer la trajectoire globale de développement à long terme des relations russo-africaines“, ont déclaré les organisateurs. Des présentations d’opportunités qui peuvent être offertes aux pays africains seront faites pour les chefs d’État et les délégués par les dirigeants d’entreprises telles que Rosatom, les chemins de fer russes, Rosgeo et VTB, selon le ministre russe du Développement économique Maxim Oreshkin. Quelque 23 accords intergouvernementaux et interagences et autres accords entre entreprises africaines et russes devraient être signés en marge du Forum.Chemin faisant, il y a lieu de mettre en perspective la tenue de ce sommet à l’aune des Afriques et du conflit en Ukraine…De nombreux pays africains ont adopté une position « neutre » face au conflit en Ukraine. Lors d’un vote à l’ONU le 22 mars 2022, un peu plus de la moitié des membres africains (28) ont voté en faveur d’une résolution condamnant l’invasion russe, tandis que 17 se sont abstenus, huit n’ont pas voté et un (l’Érythrée) a voté contre.La Russie et l’Ukraine sont toutes deux de grands exportateurs de carburant et de céréales et l’Afrique a été durement touchée par la hausse des prix de ces produits de base ainsi que par l’inflation des prix du carburant due à la guerre.Les 16 et 17 juin 2023, une délégation de dirigeants africains, dont le président Cyril Ramaphosa d’Afrique du Sud, le président Macky Sall du Sénégal et le président Hakainde Hichilema de Zambie, s’est rendue à Kiev et à Saint-Pétersbourg dans le cadre d’une mission de paix.« Cette guerre doit avoir une fin… Elle doit être réglée par des négociations et par des moyens diplomatiques », a déclaré le Président Ramaphosa à Saint-Pétersbourg le 17 juin 2023. « Cette guerre a un impact négatif sur le continent africain et même sur de nombreux autres pays à travers le monde ».D’ores et déjà, le 19 juin 2023, l’assistant présidentiel russe Youri Ouchakov avait déclaré au Comité d’organisation de l’événement que 50 chefs d’État africains ont confirmé, qu’ils participeraient à l’événement. 

Un sentiment anti-Occidental est très largement partagé

Quoi qu’il en soit, on aurait tort de minimiser l’importance de cet évènement quant à son impact sur le rôle et à l’influence en perte de vitesse des Occidentaux en Afrique.Dans cette perspective, Dominique de Villepin, ancien Ministre des Affaires, le dit tout de go… « le sentiment anti-occidental est très largement partagé si on prend les BRICS, si on prend l’Afrique, on voit bien comment l’Afrique est montée contre nous. Comment elle cherche à faire en sorte que la France quitte l’Afrique… Il y a un sentiment extrêmement actif, On se trompe si on parle de neutralité (NDLR vis à vis de la Russie) Et cette capacité à jouer sur le levier du Monde est assurément en faveur de la Russie ne l’oublions pas… »

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