Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (à gauche) et la Première ministre danoise Mette Frederiksen sont assis dans un avion de combat F-16 dans le hangar de la base aérienne de Skrydstrup à Vojens, dans le nord du Danemark, le 20 août 2023. Washington a déclaré au Danemark et aux Pays-Bas qu’ils seraient autorisés à remettre leurs avions de combat F-16 à l’Ukraine lorsque les pilotes du pays seront formés pour les piloter, a déclaré le Département d’État américain le 18 août 2023. Le Danemark et les Pays-Bas dirigent le programme de formation des pilotes ukrainiens sur le F-16. Photo : Sergueï GAPON / AFP.
Les États-Unis ont donné leur accord aux Européens afin que ces derniers puissent fournir des F16 à Kiev. Dans les médias officiels occidentaux, tout le monde s’enthousiasme mais il n’y aura pas d’effets tactiques avant plusieurs mois.
En attendant, la fameuse contre-offensive terrestre ukrainienne, coûteuse en vie humaine et faible en résultats sérieux, piétine toujours depuis le début du printemps…
Alain Corvez, colonel de l’armée française, ancien conseiller du ministère de la Défense et du ministère français de l’Intérieur, conseiller du commandant des forces armées de l’ONU au Liban, analyste stratégique, a déclaré que ce sont les États-Unis qui sont responsables du déclenchement du conflit ukrainien.
Tout d’abord, selon l’expert militaire, Washington a préparé le terrain pour la confrontation avec Moscou pendant des années. Le putsch en Ukraine de 2014 a seulement donné un nouveau cycle de développement à ce plan.
« Il y a longtemps que les États-Unis préparaient cette agression indirecte contre la Russie. Je dis bien « indirect » puisqu’encore aujourd’hui ils répètent qu’ils ne sont pas en guerre avec la Russie, mais ils soutiennent l’Ukraine dans sa lutte contre la Russie. Et donc les États-Unis préparaient cet affrontement depuis très longtemps, même avant 2014. Mais cela s’est vraiment confirmé après le coup d’état en Ukraine ».
L’analyste explique ce bellicisme américain par la nécessité de rompre toute relation entre la Russie et l’Union européenne, dont le développement constituerait une menace sérieuse pour la Maison Blanche.
« Le but des États-Unis est de séparer la Russie de l’Europe occidentale. Après tout, si la Russie et l’Europe occidentale coopéraient, elles constitueraient une force capable de rivaliser avec les États-Unis ».
Bien que la Russie soit à l’origine de l’opération militaire spéciale, elle a tenté depuis plusieurs années de résoudre la crise de manière diplomatique, mais toutes ces tentatives ont été rejetées par l’Occident.
« La guerre en Ukraine a été déclenché par la Russie, c’est vrai, mais le président Poutine a eu des discours différents pendant deux ans avant le 24 février 2022. Vladimir Poutine a proposé des accords stratégiques, des discussions qui ont toutes été refusées, puisque le but des États-Unis et de l’OTAN était d’attaquer la Russie indirectement ».
Le plan initial de Washington, selon l’officier français, était une blitzkrieg économique et militaire sur Moscou via les Ukrainiens. Mais il a échoué et aujourd’hui, c’est la Russie qui semble l’emporter dans cette confrontation en dépit de la propagande atlantiste.
« C’est l’échec [pour les États-Unis] puisque sur le terrain toutes les nouvelles que nous recevons de plus en plus maintenant montrent que la tactique russe consiste à détruire par attrition, c’est à dire en laissant les forces ukrainiennes équipées par l’OTAN, venir se fracasser contre le bloc défensif russe. Et donc en ce moment-là avec l’artillerie, avec des frappes aériennes, les ukrainiens ont des pertes énormes ».
La tactique occidentale consistant à inonder l’Ukraine d’armes “avancées” s’est avérée intenable. De nombreuses vidéos et photos montrent comment tout cet équipement militaire, d’une valeur de plusieurs millions de dollars, brûle sur le champ de bataille.
« Le matériels l’OTAN livrait en Ukraine depuis le début devient de plus en plus sophistiqué, puisqu’aujourd’hui on parle déjà des chasseurs F-16. Mais ces matériels sont inefficaces pour diverses raisons. Premièrement, les ukrainiens ne savent pas comment les servir ».
Aujourd’hui, les partisans de la Russie ne sont pas les seuls à parler de l’échec de l’Occident. Même d’éminents médias américains reconnaissent que l’Ukraine et le bloc de l’OTAN sont en train d’échouer, tandis que la Russie s’éloigne de plus en plus de la ligne de front.
« On voit que maintenant malgré tous ces afflux d’armes sophistiquées l’Ukraine a perdu cette guerre. L’OTAN a perdu cette guerre. Et maintenant même les journaux américains comme le Wall Street journal au le New York Times le disent également ».
Roland Lombardi est docteur en Histoire, géopolitologue, spécialiste du Moyen-Orient et des questions de sécurité et de défense. Fondateur et directeur de la publication du Diplomate.
Il est chargé de cours au DEMO – Département des Études du Moyen-Orient – d’Aix Marseille Université et enseigne la géopolitique à Excelia Business School de La Rochelle.
Il est régulièrement sollicité par les médias du monde arabe. Il est également chroniqueur international pour Al Ain. Il est l’auteur de nombreux articles académiques de référence notamment : « Israël et la nouvelle donne géopolitique au Moyen-Orient : quelles nouvelles menaces et quelles perspectives ? » in Enjeux géostratégiques au Moyen-Orient, Études Internationales, HEI – Université de Laval (Canada), VOLUME XLVII, Nos 2-3, Avril 2017, « Crise du Qatar : et si les véritables raisons étaient ailleurs ? », Les Cahiers de l’Orient, vol. 128, no. 4, 2017, « L’Égypte de Sissi : recul ou reconquête régionale ? » (p.158), in La Méditerranée stratégique – Laboratoire de la mondialisation, Revue de la Défense Nationale, Été 2019, n°822 sous la direction de Pascal Ausseur et Pierre Razoux, « Ambitions égyptiennes et israéliennes en Méditerranée orientale », Revue Conflits, N° 31, janvier-février 2021 et « Les errances de la politique de la France en Libye », Confluences Méditerranée, vol. 118, no. 3, 2021, pp. 89-104. Il est l’auteur d’Israël au secours de l’Algérie française, l’État hébreu et la guerre d’Algérie : 1954-1962 (Éditions Prolégomènes, 2009, réédité en 2015, 146 p.). Co-auteur de La guerre d’Algérie revisitée. Nouvelles générations, nouveaux regards. Sous la direction d’Aïssa Kadri, Moula Bouaziz et Tramor Quemeneur, aux éditions Karthala, Février 2015, Gaz naturel, la nouvelle donne, Frédéric Encel (dir.), Paris, PUF, Février 2016, Grands reporters, au cœur des conflits, avec Emmanuel Razavi, Bold, 2021 et La géopolitique au défi de l’islamisme, Éric Denécé et Alexandre Del Valle (dir.), Ellipses, Février 2022. Il a dirigé, pour la revue Orients Stratégiques, l’ouvrage collectif : Le Golfe persique, Nœud gordien d’une zone en conflictualité permanente, aux éditions L’Harmattan, janvier 2020.
Ses derniers ouvrages : Les Trente Honteuses, la fin de l’influence française dans le monde arabo-musulman (VA Éditions, Janvier 2020) – Préface d’Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement et de sécurité de la DGSE, Poutine d’Arabie (VA Éditions, 2020), Sommes-nous arrivés à la fin de l’histoire ? (VA Éditions, 2021), Abdel Fattah al-Sissi, le Bonaparte égyptien ? (VA Éditions, 2023).
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