[02:38, 06/07/2024] Noreen Shah:

La guerre en Ukraine, symptôme d’un Occident malade

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Inspection d’un missile SCALP de MBDA. Photo Corporal Craig Fryer (RAF Combat Camera)

Tribune libre du Cf2R N°150 / JUIN 2024

Certains observateurs se sont félicités et se félicitent encore de la condamnation (quasi) universelle de l’agression russe par la résolution onusienne du 2 mars 2022. La Russie serait bien seule, accompagnée de 5 petites voix et 35 abstentions contre 141 États en faveur de la résolution sur un ensemble de 193 membres. Mais la réalité politique n’est évidemment pas dans ce vote non contraignant de l’Assemblée générale des Nations Unies. Par-delà les symboles et les belles intentions qui nous laissent suspendus dans l’éther enivrant de la superficialité, la réalité, vraie, âpre et anguleuse, doit s’analyser dans les profondeurs de la matérialité à travers le prisme des sanctions économiques. Or quelle est la nouvelle carte à ce propos ? C’est celle d’un Occident qui se retrouve bien seul, accompagné de la Corée du Sud, de Singapour, de Taïwan et du Japon…

La guerre économique, notamment en excluant les banques russes de la plateforme de messagerie financière SWIFT, à l’instigation des États-Unis doublée du suivisme de l’Euroland, devait clouer la Russie, la réduire à un État croupion. Cette intention déclarée crânement immédiatement après l’invasion russe, entre autres par les ministres français Jean-Yves Le Drian et Bruno Lemaire, nous semblait à l’époque relever d’une communication belliciste enthousiaste plus que d’un réalisme économique. Comment pouvait-on imaginer que le plus grand pays du globe (9 fuseaux horaires), regorgeant de ressources indispensables à l’international (blé, engrais, uranium enrichi, pétrole, gaz), fort d’une technologie nucléaire, militaire et spatiale de pointe qui s’exporte, sous le coup des sanctions depuis 2014 et donc préparé à l’éventuel durcissement de celles-ci, se retrouve asphyxié, dans l’impossibilité de commercer avec le reste du monde ? Comment ne pas imaginer au contraire que de telles sanctions ne soient pas l’accélérateur d’un mouvement de fond qui se met en place depuis une bonne décennie, la mise en place d’un système financier alternatif qui échapperait à la dollarisation du système financier international ?

Or comme le constate Alexis Collomb : « Dans le sillage des menaces de 2014 après l’invasion de la Crimée, Moscou avait lancé un système de transfert de messages financiers (SPFS) et pris des dispositions pour affirmer davantage son autonomie financière. Ainsi, dans le domaine des cartes de paiement, à la suite du gel de l’utilisation des réseaux Visa et Mastercard sur le sol russe, la carte de crédit Mir avait-elle été créée. »[1] Plus loin, l’auteur ajoute : « Les sanctions visant à exclure la plupart des grandes banques russes internationales de SWIFT s’inscrivent dans une stratégie d’isolement économique, financier et technologique de la Russie du monde occidental. Elles devraient contribuer à mettre en place un « rideau de fer financier », non pas entre la Russie et le reste du monde, mais entre la Russie et l’Occident. »[2].

Ce n’est donc pas tant la Russie qui aura à souffrir de cette tentative d’isolement, mais c’est l’Europe qui est en train de pâtir de sa propre politique. Après la crise des Subprimes de 2008, la crise sanitaire de 2020 et enfin les sanctions sur l’énergie russe, le « quoiqu’il en coûte » jupitérien risque effectivement de coûter très cher et l’Europe se prépare un avenir bien sombre. Ajoutons les propos de Jean de Gliniasty : « Avec le marché russe, c’est un champ de développement économique majeur que l’Union européenne perd pour les décennies à venir. Sa croissance et sa prospérité devraient s’en ressentir. »[3] Les prévisions du FMI sont d’ailleurs à l’avantage de la Russie pour 2024. Les économies européennes semblent être arrivées au pied du mur : augmenter les taux directeurs afin de casser l’inflation, c’est rendre la dette des États insupportable ; injecter des aides supplémentaires, c’est nourrir l’emballement inflationniste. Quelle pourrait être la nouvelle parade dans une pareille situation ? Quelle nouvelle surprise nous réservent les commissaires et autres technocrates de l’Euroland ?

Comme le dit très justement George-Henri Soutou[4], l’Europe s’est mise dans une dépendance contradictoire fondamentale : à l’égard des États-Unis pour sa sécurité militaire et, depuis les années 2000[5], à l’égard de la Russie pour sa sécurité énergétique. Sur le chapitre militaire, comme nous l’avons vu, cette aliénation européenne a commencé avec la fondation de l’OTAN (1949) que l’Europe de l’Ouest appelait de ses vœux. Hubert Védrine, de passage au Club 44 à la Chaux-de-Fonds en Suisse[6], confirme cette volonté européenne persistante, surtout chez les nouveaux arrivants de l’Est, d’être sous protection américaine. Et si les décisions récentes d’augmenter les budgets militaires continentaux démentent très partiellement cette thèse, George-Henri Soutou avance que « malgré les 100 milliards injectés cette année, le réarmement allemand mettra longtemps à se traduire dans les faits, tout comme celui des autres pays européens, largement démilitarisés depuis la fin de la guerre froide. »[7] L’Europe a donc en attendant choisi Washington qui de son côté souhaitant rompre cette dépendance européenne au gaz russe, initie des sanctions radicales avec l’approbation zélée de la Commission européenne qui sacrifie ainsi sa capacité industrielle et donc son économie. C’est ce qui nous laisse raisonnablement penser, conformément à la thèse de Seymour Hersh, que les États-Unis sont les commanditaires du sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2. Évidemment, ce genre d’hypothèse qu’il faut taire, ne peut que déplaire à certaines chancelleries européennes – notamment allemande – qui se retrouveraient fondamentalement abusées par leur « protecteur ». Un « protecteur » qui peut se vanter de faire une opération lucrative. A ce propos, Hélène Richard rapporte les propos du ministre Le Maire : « Le conflit en Ukraine ne doit pas se solder par une domination économique américaine et un affaiblissement de l’Union, semble découvrir tardivement le ministre de l’économie Bruno Le Maire devant l’Assemblée nationale. Nous ne pouvons pas accepter que notre partenaire américain vende son GNL quatre fois le prix auquel il le vend à ses industriels. »[8]

Dans ce malaise diplomatique concernant le sabotage des gazoducs où personne n’est dupe mais tout le monde se tait, l’enquête toujours en cours évente le 8 mars 2023 de manière peu sérieuse une piste ukrainienne, immédiatement récusée par le gouvernement de Kiev. Rappelons-nous à propos du gaz russe les fortes oppositions formulées déjà par Obama et de manière tonitruante par son successeur Trump qui menaçait de sanctionner l’Allemagne. D’après la correspondante Johanna Luyssen[9], Trump accusait « l’Allemagne d’être « complètement contrôlée par la Russie », utilisant même le terme de « prisonnière ». L’Allemagne, estimait-il alors, « paie des milliards de dollars à la Russie pour ses approvisionnements en énergie et nous devons payer pour la protéger contre la Russie. Comment expliquer cela ? Ce n’est pas juste. » Rappelons-nous également que Trump souhaitait désengager les États-Unis de l’OTAN ou du moins « mieux partager le fardeau » de cette organisation « obsolète ». Cette crise nous valut le diagnostic réaliste de Macron le 7 novembre 2019 dans une interview accordée à The Economist : « Vous n’avez aucune coordination de la décision stratégique des États-Unis avec les partenaires de l’OTAN et nous assistons à une agression menée par un autre partenaire de l’OTAN, la Turquie, dans une zone où nos intérêts sont en jeu, sans coordination ». Macron fait référence aux Forces démocratiques syriennes, majoritairement kurdes, qui ont constitué une véritable force de résistance contre Daesh et qui néanmoins ont été lâchées par les États-Unis de Trump en 2018 et conjointement agressées de manière unilatérale par la Turquie d’Erdogan. Par ailleurs, que devient l’article 5 dans une pareille situation, si la Syrie devait répliquer contre la Turquie ? C’est ce qui nous valut la formule macronienne de « mort cérébrale de l’OTAN ». Ce constat étant posé, le président français réclame une « Europe de la défense » et souhaite rouvrir « un dialogue stratégique » avec la Russie. Il appelle de ses vœux en Europe « un réveil, une prise de conscience de cette situation et une décision de s’en saisir », sans quoi « le risque est grand, à terme, que géopolitiquement nous disparaissions, ou en tous cas que nous ne soyons plus les maîtres de notre destin ».

Les décisions prises récemment vont donc à rebours de ce vœu : renoncer au gaz russe et rester inféodé au parrain américain, « quoi qu’il en coûte ». L’article de George-Henri Soutou, « La grande rupture »[10], construit une analyse qui nous semble relever du bon sens, dans lequel nous retrouvons la confirmation de bon nombre de nos hypothèses. Ces quelques lignes résument parfaitement le déséquilibre actuel : « Certains ont annoncé l’effondrement économique rapide de la Russie. Or c’est l’Occident et en particulier l’Europe qui sont entrés dans une crise (inflation et manque de matières premières) largement causée par la guerre et les sanctions, mais qui est aussi un nouvel épisode dans le dérèglement de l’économie occidentale que l’on constate depuis 2008 y compris un considérable laxisme des Banques centrales. »[11] Le sort de l’Europe semble en effet joué. Et dans son suivisme délétère, elle s’est condamnée à court terme : « L’issue finale du conflit est encore imprévisible, mais dans tous les cas de figure l’Union européenne resterait en face de problèmes énergétiques et économiques gigantesques. »[12]

Pourtant, les États-Unis ne sont pas en reste. Et nous analysons en effet cette guerre comme l’effort désespéré des Démocrates américains, héritiers du messianisme néoconservateur, de maintenir à flot leur impérialisme unipolaire hérité de la fin de la Guerre froide, impérialisme pourtant déjà révolu et sur le déclin. Dans ce mauvais jeu du quitte ou double, les Américains veulent assurément en découdre avec la Russie en réduisant son potentiel économique, en déstabilisant le pouvoir et en créant ainsi une crise politique intérieure majeure dont ils pourraient récupérer les dividendes. Mais derrière la Russie, c’est le couple sino-russe qui est visé et donc finalement la Chine. Ce que les États-Unis veulent éviter à tout prix, c’est le scénario qui est en train de se construire sous nos yeux et que Soutou formule en ces termes : « Il est tout à fait possible qu’une constellation internationale nouvelle apparaisse : un ensemble occidental autour des États-Unis contre un ensemble sous direction sino-russe, reposant sur des systèmes politiques, économiques et « de valeurs » fort différents. C’est plus complexe que le slogan occidental de la lutte des « démocraties contre les autocraties », qui est une simplification excessive. »[13] L’Organisation de coopération de Shanghai (2001) et celle des BRICS (2009) sont la manifestation claire d’une volonté de rééquilibrer les rapports internationaux et de rompre avec l’unilatéralisme américain. Notons que trois acteurs se superposent dans ces deux organisations et constituent un axe géopolitique majeur : la Russie, la Chine et l’Inde.

Cette résistance de la dernière chance américaine est confirmée par le témoignage de Naftali Bennett, ex-Premier ministre israélien et médiateur lors de la première phase du conflit en mars 2022 : « J’avais l’impression qu’ils voulaient tous les deux [la Russie et l’Ukraine] un cessez-le-feu » dit-il au cours d’une interview sur la chaîne israélienne Channel 12 le 4 février 2023. Les concessions allaient bon train : Zelenski était notamment prêt à renoncer à ce que l’Ukraine intègre l’OTAN et Poutine renoncerait à démilitariser l’Ukraine. Puis les Occidentaux, principalement le couple américano-britannique, ont rompu les négociations de paix entre Kiev et Moscou : « Ils l’ont bloqué et j’ai pensé qu’ils avaient tort » ajoute-t-il.

Mais en dépit de cet acharnement belliqueux de l’Occident, nous pensons encore une fois que le mouvement de bascule s’est déjà produit et que le symptôme le plus significatif de ce monde d’après est la remise en question fondamentale de la suprématie du dollar américain dans le système monétaire international. Ce diagnostic nous est confirmé par le propos d’Alexis Collomb : « La domination du dollar dans les échanges internationaux, qui s’appuie sur la puissance économique et militaire américaine, semble déranger de plus en plus, non seulement les grands rivaux chinois ou russe, mais également en Europe où l’utilisation du billet vert à des fins politiques et l’extraterritorialité des sanctions américaines sont de plus en plus contestées. »[14]

Le dollar comme monnaie de référence a été sacré par la conférence de Bretton Woods en juillet 1944. Mais un autre événement nous semble encore plus déterminant dans la mise en œuvre de cet imperium de la monnaie américaine. Il s’agit du pacte de l’USS Quincy du 14 février 1945, entre le président Roosevelt et le roi Ibn Saoud. On résume souvent cet accord au syntagme : pétrole contre protection. En d’autres termes : en échange du monopole d’exploitation du pétrole sur l’ensemble du territoire de l’Arabie saoudite par la société Aramco (Arabian American Oil Company), les États-Unis garantissent la protection de la famille Saoud. En réalité, la garantie de ce pacte va encore plus loin et se résume à un autre syntagme : pétrole contre dollar. Ainsi, les États-Unis ont la garantie que le marché énergétique mondial sera coté et libellé en dollar tout comme l’ensemble des échanges du commerce international, ce qui fait du dollar la monnaie de réserve universelle. Ce Quincy Agreement est renouvelé pour soixante ans par l’administration Bush en 2005.

Cette suprématie du dollar n’est pas remise en question par la décision du 15 août 1971, qui sonne le glas des accords de Bretton Woods, date à laquelle les États-Unis, en pleine tourmente vietnamienne, se libèrent de la convertibilité du dollar en or, s’autorisent à dévaluer leur monnaie et peuvent s’endetter à bas prix. Par un tour de passe-passe syllogistique, les Américains se permettent de vivre à crédit puisque : leur dette est en dollar, or le dollar est la monnaie internationale, donc leur dette est internationale. C’est ce qui fait dire à John Connaly, secrétaire au Trésor américain de l’administration Nixon, s’adressant à une délégation européenne : « Le dollar est notre monnaie, mais c‘est votre problème. » Pourtant, cette dette n’a cessé de croître avec les années pour arriver à ce jour à des sommets stratosphériques, transformant graduellement cet instrument économique en monnaie de singe qui reste pourtant la monnaie de référence. L’article de Myret Zaky[15] publié en février 2004, évoque la volonté de l’OPEP de remettre en question un dollar dévalorisé au profit de la nouvelle monnaie européenne. En octobre 2000, Saddam Hussein annonce qu’il veut facturer son pétrole en euros. Or comme le dit Myret Zaky, si comme le pense William Clark de la John Hopkins University, l’intervention américaine en 2003 doit être interprétée dans la continuité de cette décision du Président irakien – qui le paiera de sa vie – nous pouvons supposer que cette intervention vise également à calmer les ardeurs indépendantistes de l’OPEP. De la même manière, en 2009, Kadhafi veut créer une monnaie panafricaine en remplacement du dollar, le dinar-or, qui permettait de libeller les transactions pétrolières. Est-ce que l’intervention de l’OTAN en 2011 doit être analysée dans la continuité de cette volonté ? Des voix s’expriment dans ce sens, notamment celle d’Alain Chouet[16] qui énumère les différents États producteurs de pétrole qui ont tenté de se retirer de la cotation en dollar non sans avoir de gros problèmes avec les Américains : Venezuela, Nigeria, Angola, Iran et bien entendu l’Irak, la Libye mais aussi la Russie. Il ne fait pas bon s’attaquer au dollar américain qui, comme le dit Alexis Collomb, conforte sa domination avec sa puissance militaire.

Signe que les temps changent pourtant, le prince héritier de l’Arabie saoudite Mohammed ben Salmane (MBS) prend nettement ses distances vis-à-vis du parrain américain après 80 ans de collaboration étroite – en dépit de la crise de 1973. Biden n’avait pas mâché ses mots lors de sa campagne présidentielle, promettant de traiter MBS en « paria ». Le prince est en effet soupçonné par les renseignements américains d’être le commanditaire de l’assassinat et du démembrement de Khashoggi en octobre 2018 au consulat du Royaume à Istanbul. Mais à y bien réfléchir, suite à l’événement du 24 février 2022 qui nous préoccupe, le nouveau locataire de la Maison blanche est prêt à se départir de son moralisme et à retourner sa veste afin de convaincre MBS de s’attaquer aux finances russes, à sa rente en hydrocarbures, et ce d’autant que la Russie est un partenaire de l’OPEP+. Pourtant d’après un article du Wall Street Journal du 8 mars 2022, MBS et son voisin Mohammed ben Zayed (MBZ), président des Émirats arabes unis, ne daignent pas répondre aux appels du président Biden. Sans se décourager, le vieux président prend son bâton de pèlerin et s’envole direction Riyad à la mi-juillet non sans les critiques de la presse américaine et de son propre camp. Précisons qu’à quelques mois des élections du mi-mandat présidentiel, le cours du pétrole est au plus haut, et il s’agit de convaincre MBS d’augmenter la production pour faire baisser la pression inflationniste qui pèse sur le peuple américain. Rien n’y fait. Ce bougre de jeune prince n’en fait qu’à sa tête et s’entend avec ce diable de Poutine le 5 octobre, lors d’un sommet de l’OPEP, pour diminuer la production pétrolière de 2 millions de barils par jour, ce qui maintient les prix élevés et profite abondamment à la trésorerie du Kremlin. Le vieil homme s’énerve sur CNN le 12 octobre : « Il y aura des conséquences pour ce qu’ils ont fait avec la Russie ». Le 4 décembre les membres de l’OPEP+, au vu de l’évolution des cours du pétrole, confirment leur décision et maintiennent les quotas. A titre de mesure de rétorsion, le gouvernement américain fait bénéficier le prince de l’immunité judiciaire due à sa fonction. En effet, fin septembre, par décret royal, MBS est nommé Premier ministre. La plainte déposée aux États-Unis contre lui pour son crime présumé de Khashoggi est classée sans suite.

Mais le jeune trublion saoudien n’en reste pas là. Le Wall Street Journal mentionne dans son article du 15 mars 2022 les discussions entre l’Arabie saoudite et la Chine en vue de négocier le pétrole en yuans. Le 17 janvier 2023, au Forum de Davos, le ministre des Finances, Mohammed Al-Jadaan déclare au média Bloomberg que le Royaume est prêt à commercer avec d’autres devises que le dollar. Il fut une époque, pas si lointaine, un tel affront se serait peut-être terminé dans le sang ou du moins aurait été sévèrement recadré. Mais les temps changent et les États-Unis ne jouissent plus de la même impunité. Alors à quoi riment les menaces proférées par Biden ? Quelles conséquences peut-il bien réserver à MBS et à l’Arabie saoudite ?

Ce rééquilibrage des forces géopolitiques qui progressivement met un frein à l’hubris étatsunienne est pronostiqué par Alexis Collomb à propos du système SWIFT : « Dans un monde de plus en plus conflictuel, avec une « régionalisation » croissante, on devrait avoir à terme autant de grandes infrastructures de messagerie financière et de paiement interbancaires que de zones d’influence, certes interopérables entre elles mais autonomes dans leur sphère géopolitique. Avec le conflit en Ukraine et la reconfiguration des échanges commerciaux de la Russie avec la Chine, l’Inde ou d’autres partenaires asiatiques ou africains, le développement d’alternatives régionales à SWIFT semble inéluctable, en même temps qu’un rééquilibrage du système financier mondial. »[17] Or ce qui est dit du système de transaction international peut également être dit à propos des moyens d’échange : les monnaies.

Ainsi, en voulant déconnecter la Russie du système financier international afin d’assécher ses capacités économiques et militaires, l’Occident a réussi à souder l’autre monde autour de la Russie et est parvenu à accélérer son propre déclassement avec des conséquences sans doute très lourdes mais difficilement mesurables. L’Europe, si elle veut encore exister, va devoir repenser fondamentalement sa stratégie politique, militaire et économique en prenant ses distances vis-à-vis des États-Unis. Les futures élections présidentielles américaines avec une victoire républicaine pourraient être l’occasion d’amorcer ce mouvement.

Quant au dollar universel, que pouvons-nous en dire ? L’économie est une affaire de confiance. Certes la monnaie américaine s’appuie sur une économie aujourd’hui encore réactive et une armée puissante. Mais l’endettement astronomique de sa trésorerie a profité de manière inconsidérée de l’interdépendance mondiale vis-à-vis de sa monnaie. Effectivement, leur monnaie est « notre problème » et la dette américaine est d’une certaine manière notre dette. Mais que se passerait-il si le dollar américain devait être frappé d’une crise de confiance ? La Chine semble anticiper – ou créer – cette situation depuis quelques années et se désengage sensiblement en revendant ses bons du Trésor américain, dette qui est notamment rachetée par la Réserve fédérale américaine. Le point le plus haut de possession chinoise de la dette publique américaine se situe en 2011[18]. Autre argument qui peut s’ajouter au tableau, d’après Alexis Toulon, suite aux sanctions de 2014, la Russie s’est évidemment rapprochée de la Chine et de ses lignes de crédit. Il conclut : « Au passage, la Chine profite de ces opérations pour court-circuiter le dollar dans les échanges entre les deux pays et renforcer la position du yuan comme monnaie d’échange international. »[19]Endettement pharaonique du Trésor américain, remise en question des pétrodollars, perte de la suprématie de la monnaie américaine dans le commerce international, les indices du mouvement de bascule sont sensibles.

Ainsi, comme le relève Soutou[20] : « Les nouvelles réalités géopolitiques apparaissent-elles plus clairement : la Chine et la Russie décidément se rapprochent, de l’Asie à l’Amérique latine en passant par l’Afrique et le Moyen-Orient beaucoup de pays se refusent à condamner la Russie. » Il ajoute : « La prétention affichée par Poutine de bâtir avec la Chine et d’autres partenaires un système international alternatif ne paraît plus en soi irréalisable ». Nous ajoutons, pour notre part, que ce scenario semble inévitable. Et de fait, dans deux articles, Émile Bouvier nous montre dans le contexte de la guerre en Ukraine à quel point les États-Unis sont en perte de vitesse dans la région du Moyen-Orient[21], alors que la Russie approfondit son influence entamée en 2015 lors de son intervention syrienne, afin de sauvegarder le régime de Bachar al-Assad[22]. A partir de 2019, la diplomatie américaine a en effet réussi à entamer profondément la relation de confiance traditionnelle avec cette région (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Égypte, Jordanie, Liban). La Russie quant à elle tisse des liens politiques et économiques et prend le relais de marchés, notamment militaire, qui étaient le domaine réservé des Américains.

Le rapprochement entre la Russie et la Chine est une évidence que certains observateurs peinaient à reconnaître. Pourtant de nombreux signes pouvaient le laisser entrevoir. Lors de la visioconférence du 30 décembre 2022, Poutine et Xi Jinping s’entretiennent à propos de leurs relations qualifiées par le président russe de « meilleures de l’histoire ». Effet de propagande disent les sceptiques. Pourtant, au fond de cette propagande, il est question de coopération militaro-technique et de renforcement de l’interaction des forces armées russes et chinoises, domaines qui occupent une place particulière dans cette coopération bilatérale. Il est question de coordonner l’action de Moscou et Pékin en politique internationale au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, de l’Organisation de la coopération de Shanghai, des BRICS et du G20. Il est aussi constaté que le volume économique annuel des affaires mutuelles a atteint un niveau record de 180 milliards de dollars et qu’à ce rythme l’objectif fixé de 200 milliards de dollars pour 2024 sera atteint avant terme. Un peu plus tôt, le 29 novembre 2022, à l’occasion du 4e Forum d’affaires Chine-Russie sur l’énergie, Xi déclare que « la Chine était disposée à travailler avec la Russie pour forger un partenariat plus étroit en matière de coopération énergétique. »[23] Il souligne que dans un contexte international difficile qui met le monde au défi, la coopération sino-russe s’est renforcée avec un partenariat stratégique global menant les deux pays dans une nouvelle ère. Concrètement, en ce qui concerne l’énergie, en 2024 le début des travaux du gazoduc Force de Sibérie 2, d’une capacité de 50 milliards de mètres cubes par an, viendra compléter le premier gazoduc actif depuis 2019. Par ailleurs, le 25 octobre 2022, le journal Les Echos mentionne que depuis le début de la guerre en Ukraine, les importations énergétiques chinoises en provenance la Russie ont dépassé 50 milliards de dollars. Il est également question de coopération dans la construction de centrales nucléaires en Chine ou encore dans la production de gaz naturel liquéfié dans l’Arctique russe[24]. Le dernier événement en date, la visite d’État de Xi Jinping en Russie du 20 au 22 mars 2024, met au grand jour le principe de réalité. En effet, à cette occasion, les deux présidents affichent une unité incontestable et il est intéressant à ce propos de voir leur échange du 20 mars et le dispositif scénique devant la presse. Derrière le protocole diplomatique, nous voyons le caractère performatif des déclarations, notamment lorsque Xi s’adresse à Poutine : « Monsieur le Président, je vous appelle toujours mon cher ami », ou encore : « ça me fait plaisir de venir en Russie, en visite officielle sur votre invitation, après ma réélection en tant que Président. C’est le premier pays étranger auquel je rends visite. J’ai choisi la Russie ».

Durant cette visite[25], il est question de la conclusion des accords gaziers, de la proposition de paix chinoise formulée le 24 février dernier à propos de la guerre en Ukraine – proposition à laquelle les États-Unis refusent de donner suite –, il est question de sécurité et de l’activisme « préoccupant » de l’Occident aux frontières russes et dans la région Asie-Pacifique, de la guerre nucléaire qui ne « doit jamais être déclenchée », des activités militaires biologiques américaines menées sur leur territoire et au-delà et du déploiement de leurs missiles dans plusieurs régions du monde afin de « conserver un avantage militaire unilatéral ». Ceci fait écho à la déclaration du 30 janvier de Mao Ning, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères : « Si les États-Unis souhaitent réellement une fin rapide à la crise et se soucient de la vie du peuple ukrainien, ils doivent cesser d’envoyer des armes et de tirer profit des combats. Les États-Unis doivent agir de manière responsable en aidant à la désescalade de la situation dès que possible, et créer l’environnement et les conditions nécessaires à des pourparlers de paix entre les parties concernées ». Enfin, dernier point qui nous semble crucial, Poutine défend le yuan comme monnaie d’échange contre le dollar : « Nous soutenons l’utilisation du yuan chinois dans les paiements entre la Russie et les pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine »[26]. Il constate par ailleurs que deux tiers des échanges entre Moscou et Pékin sont réalisés en roubles et yuans, pratique qui doit être davantage encouragée. Cette déclaration est appuyée le 29 mars par le vice-président de la Douma, Alexandre Babakov, qui estime qu’une nouvelle relation financière doit lier l’Inde, la Russie et la Chine qui échappent au dollar et à l’euro.[27] Ce même jour, la compagnie pétrolière russe Rosneft conclut un accord avec Indian Oil pour augmenter la livraison de pétrole en Inde et diversifier ses qualités. Dans son communiqué il est stipulé que « les parties ont discuté de l’élargissement de la coopération globale dans le secteur de l’énergie entre les entreprises russes et indiennes tout au long de la chaîne technologique, ainsi que de la possibilité de règlements mutuels en monnaies nationales. »[28]D’après le ministère indien du Commerce, en 2022, la Russie est l’un des cinq principaux partenaires commerciaux de l’Inde, avec un volume d’échanges entre les deux pays de 38,4 milliards de dollars.

La rupture multipolaire ou nouvelle bipolarisation du monde ?

Cet essai de réflexion nous amène donc à la question initiale de la rupture historique du conflit engagé en Ukraine. Si cette guerre a pris une dimension spectaculaire par son caractère international, la médiatisation qui en est faite et les enjeux majeurs qu’elle cristallise, il nous semble très délicat d’affirmer que nous avons affaire à une rupture fondamentale qui dans un rapport comparatif mettrait cet événement au-dessus de tous les autres.

Pour y voir plus clair, tâchons de faire un bref récapitulatif des dates qui nous semblent décisives et qui peuvent constituer autant de moments de rupture. Retenons tout d’abord le discours du président Poutine du 10 février 2007, lors de la Conférence sur la sécurité de Munich, comme une rupture intellectuelle qui annonce le programme géopolitique de la Russie à venir. Le « printemps » syrien de 2011 est l’occasion pour la Russie et la Chine d’opposer leur volonté à l’interventionnisme occidental en utilisant leur droit de veto au Conseil de sécurité des Nations unies. Nous voyons dans cet épisode une rupture politique et les prémisses d’une remise en question de l’unipolarité américaine. C’est la première fois que les États-Unis se confrontent à une opposition décisive depuis la fin de la Guerre froide. L’Euromaïdan précipite les événements et engage la Russie à rattacher la Crimée en 2014, ce qui va susciter le premier épisode de sanctions occidentales contre l’économie russe. Pour cette raison, nous analysons cet événement crucial comme une rupture économique qui pousse la Russie à opérer un mouvement de bascule vers le monde asiatique, et d’une manière générale vers le monde non-occidental. Nous n’avons pas assez insisté sur l’année 2015. Or, le 30 septembre, à la demande de Bachar al-Assad, la Russie intervient militairement en Syrie – qui a vécu son « printemps arabe » – contre les différentes armées salafistes et principalement Daech. Cette opération russe parvient à maintenir le pouvoir Assad en place, rejette à la périphérie de cette « guerre-monde » l’Alliance atlantique et verrouille l’action géopolitique russe au Moyen-Orient. Contrairement à l’interventionnisme occidental dévastateur, occasionnant le chaos en Irak (2003), en Libye (2011), facilitant l’émergence du monstre Daech avec des prolongements tragiques en Syrie (2011), doublé de l’action terroriste en Europe, la Russie est perçue comme un vecteur de stabilisation, comme un partenaire fiable, non ingérant. Pour la première fois depuis la fin de la Guerre froide, la Russie intervient au-delà du périmètre ex-soviétique, au-delà de son « étranger proche » – nous pensons à la guerre de proximité en Géorgie (2008) – et nous analysons 2015 comme une rupture militaire. Enfin, l’année 2022 est marquée par le début de la guerre en Ukraine qui ajoute une autre dimension à celles que nous avons déjà identifiées, il s’agit à notre avis fondamentalement d’une rupture financière puisqu’en sanctionnant la Russie sur ses capacités de transactions, l’Occident accélère la fin de l’hégémonie du dollar.

Il est vrai que ce conflit ukrainien semble être le point d’orgue et l’aboutissement d’une série préalable d’événements-ruptures. Par ailleurs, il semble condenser de manière dialectique l’ensemble des moments de crises préalable (intellectuel, politique, économique, militaire) tout en constituant un accélérateur dramatique. Enfin, cette rupture financière ou plutôt monétaire, nous semble encore plus profonde que les autres ruptures analysées par son caractère irréversible. Quelle que soit l’issue de cette guerre, le pari de Poutine est déjà réussi : la remise en question déjà très largement consommée de l’ordre américain et du règne universel de sa monnaie. Et rien ne semble pouvoir arrêter ce mouvement de fond. Plus les États-Unis s’acharneront dans cette guerre, plus leur crédit, qui est déjà très entamé, s’étiolera, suscitera un désaveu massif et une hostilité anti-occidentale grandissante[29], puisque l’Europe semble fermement arrimée à cette politique suicidaire.

Mais alors la question qui se pose, si rupture il y a, est celle de l’après rupture. Qu’est-ce que nous réserve ce monde d’après ? Aurons-nous à faire à un monde multipolaire que la Russie et la Chine appellent de leurs vœux ou bien allons-nous vers une nouvelle bipolarisation avec un Occident rejeté à la périphérie du monde ? Pour répondre à cette question, nous souhaitons convoquer ces quelques lignes de Georges-Henri Soutou : « Pour notre propos ici, l’essentiel n’est d’ailleurs pas la suite peu prévisible des péripéties de la guerre en Ukraine, mais la perspective de voir le monde se réorganiser, à la suite du conflit, en deux grands groupes, un groupe occidental autour de Washington et un groupe sino-russe. Que la Russie marque des points, et les Occidentaux se regrouperont encore plus autour des États-Unis. Qu’elle échoue, elle sera d’autant plus tentée de renforcer ses liens avec la Chine et d’autres pays peu satisfaits de la prééminence occidentale, comme l’Inde. »[30]

Fait remarquable qui va dans le sens d’un approfondissement des deux blocs, le 10 mars 2023, les deux ennemis jurés du monde musulman, l’Iran et l’Arabie saoudite, annoncent la reprise de leurs relations diplomatiques interrompues depuis 2016, sous le parrainage discret de Pékin qui depuis deux ans œuvre secrètement dans les négociations. La Chine se profile ainsi comme nouvel interlocuteur du Moyen-Orient, espace traditionnellement occupé par les États-Unis en perte de vitesse sur ce dossier également.

Contrairement à certaines craintes formulées à propos du monde d’après, craintes qui justifient par ailleurs les discours les plus bellicistes et les plus simplistes (« la guerre du monde démocratique contre le monde autocratique »), nous pensons que le rééquilibrage des forces géopolitiques est nécessaire et sera à terme profitable. L’enjeu n’est évidemment pas la disparition de l’Occident, mais sa régionalisation. La Guerre froide est peut-être un bon modèle pour se représenter la relation à venir entre deux blocs. Cet épisode de l’histoire, ponctué certes par ses crises (Berlin en 1948 et 1961, Cuba en 1962) était au fond une période de stabilisation des rapports internationaux et géopolitiques. Une certaine prudence prévalait d’après Soutou[31] et cette période tirait son bénéfice d’une dialectique Est-Ouest. Avec la fin de cette Guerre froide, le monde s’est laissé prendre par l’ivresse occidentale de la victoire suprême de 1991 et son délire universaliste. Cet Occident fou a sombré ces trois décennies durant dans une pathologie égotique, refermée sur lui-même et sans boussole. Nous voyons donc le rééquilibrage des forces s’opérer sous nos yeux comme un remède. Que dans un proche avenir, l’antidote soit bipolaire ou multipolaire importe peu. C’est la présence d’une altérité forte et respectée qui compte. Elle crée une dialectique absolument indispensable à la bonne tenue de la relation avec l’Autre et donc avec soi-même. Il faudra dorénavant composer avec ce voisinage.


[1] Collomb, Alexis. « SWIFT : de la neutralité à l’arme géopolitique ? », Politique étrangère, vol., n)3, 2022, pp. 46-47

[2] Ibid., p. 47

[3] de Gliniasty, Jean. « L’Europe victime collatérale de l’invasion de l’Ukraine par la Russie ? », Revue Défense Nationale, vol. 850, n° 5, 2022, p. 18

[4] Soutou, Georges-Henri. « Non, la crise ukrainienne n’est pas un retour à la guerre froide, mais c’est toujours un conflit Est-Ouest », Revue Défense Nationale, vol. 849, n° 4, 2022, p. 10.

[5] Grekou, Carl, et al. « La dépendance de l’Europe au gaz russe : état des lieux et perspectives », Revue d’économie financière, vol. 147, n° 3, 2022, p. 228.

[6] Védrine, Hubert, « Une remise en cause de la vision occidentale de la mondialisation ? Une mondialisation fragmentée », Club 44, 25 octobre 2022

[7] Soutou, Georges-Henri. « La grande rupture », Stratégique, vol. 129, n° 2, 2022, p. 28

[8] Hélène Richard, « Des sanctions à double tranchant », Le Monde diplomatique, Mardi 1 novembre 2022, p.17

[9] https://www.liberation.fr/planete/2019/01/14/gazoduc-nord-stream-2-les-etats-unis-accentuent-la-pression-contre-l-allemagne_1702787/

[10] Soutou, G-H. « La grande rupture », op. cit., pp. 11-30.

[11] Ibid., p. 14

[12] Ibid., p. 29

[13] Ibid., p. 28

[14] Collomb, Alexis. « SWIFT : de la neutralité à l’arme géopolitique ? », Politique étrangère, vol., n°3, 2022, p. 48

[15] Zaky, Miret, « Scénario catastrophe américain : et si le pétrole se payait en euros ? », Le Temps, 11 février 2004 https://www.letemps.ch/economie/scenario-catastrophe-americain-petrole-se-payait-euros

[16] Chouet, Alain, « Alain Chouet, 35 ans de DGSE, une pointe de diamant ? », Thinkerview, 18 mai 2022 https://www.thinkerview.com/alain-chouet35-ans-de-dgse-une-pointe-de-diamant/

[17] Collomb, Alexis. « SWIFT : de la neutralité à l’arme géopolitique ? », Politique étrangère, vol., no. 3, 2022, p. 49

[18] https://www.letemps.ch/economie/finance/chine-japon-se-detournent-dette-americaine

https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/05/29/pour-la-chine-l-arme-de-la-dette-americaine-reste-difficile-a-activer_5469079_3234.html

http://french.china.org.cn/foreign/txt/2023-01/20/content_85070117.htm#:~:text=A%20ce%20jour%2C%20la%20Chine,plus%20faible%20depuis%20juin%202010.

[19] Toulon, Alexis. « La Russie mise sur la Chine », Alternatives Économiques, vol. 342, no. 1, 2015, p. 44.

[20] Soutou, G-H. « La grande rupture », op. cit., p. 27

[21] Bouvier, Émile, « La guerre en Ukraine, révélatrice de l’influence croissante de Moscou au Moyen-Orient (1/2) : une perte de vitesse notable des États-Unis dans la région », Les clés du Moyen-Orient, 18 mars 2022, https://www.lesclesdumoyenorient.com/La-guerre-en-Ukraine-revelatrice-de-l-influence-croissante-de-Moscou-au-Moyen.html#nh17

[22] Bouvier, Émile, « La guerre en Ukraine, révélatrice de l’influence croissante de Moscou au Moyen-Orient (2/2) : une présence russe protéiforme », Les clés du Moyen-Orient, 18 mars 2022, https://www.lesclesdumoyenorient.com/La-guerre-en-Ukraine-revelatrice-de-l-influence-croissante-de-Moscou-au-Moyen-3502.html#nh27

[23] http://french.xinhuanet.com/20221129/c62d5b87417242b5b85c3ca71331723d/c.html

[24] https://francais.rt.com/economie/102704-chine-entend-renforcer-son-partenariat-energetique-russie

[25] https://francais.rt.com/international/104968-xi-jinping-moscou-chine-russie

[26] https://francais.rt.com/international/104977-poutine-soutient-dedollarisation-echanges-mondiaux

[27] https://tass.com/economy/1596017

[28] https://francais.rt.com/economie/105163-rosneft-indian-oil-signent-pour-augmenter-livraisons-brut-russe-inde

[29] Alain Gresh, op. cit.

[30] Soutou, G-H, « La grande rupture », op. cit., p. 13.

[31] Soutou, G-H, La guerre de cinquante ans, op. cit.

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