HISTOIRE MILITAIRE – La bataille du Mont Renaud (26 – 30 mars 1918)

Shares
Mont Renaud
Soldat français avec Chauchat, photo prise par Jacques Ridel au Monchel (mai 1918). Montage et extension avec IA Adobe Photoshop.

Par Sylvain Ferreira

Alors que le 21 mars 1918, l’offensive allemande « Michaël » perce le front britannique dans la Somme, l’engagement rapide des réserves françaises sur le flanc sud permet d’enrayer peu à peu l’élan allemand. Cependant, malgré l’arrivée des 1re et 9e DI du 5e corps du général Pellé, les Allemands entrent dans Noyon le 24 mars. L’artillerie française installée sur les hauteurs dominant la ville fait pleuvoir un déluge d’obus pour stopper la progression ennemie. Le 26, les Allemands gagnent les pentes du Mont Renaud pour s’en emparer. 

Une position unique

Installé sur un promontoire dominant le canal du Nord au sud-ouest de Noyon, le Mont Renaud est couronné par un château construit sur l’emplacement d’une ancienne commanderie de l’ordre du Temple. Le 26 mars avant l’aube, cette position transformée en point d’appui passe sous le contrôle du 1er bataillon du 57e RI diminué de ses 1re et 3e compagnies dont personne n’a de nouvelles depuis la veille. Le reste du régiment occupe Sempigny dont il faut bientôt détruire les ponts sur l’Oise pour ralentir la progression allemande. A 8 heures, un détachement du génie de la 1re DI fait effectivement sauter le pont sous la protection des hommes du 57e RI. Cette destruction coupe néanmoins le régiment en deux et isole les hommes du 1er bataillon. 

Mont Renaud
Carte du Mont Renaud

Le premier assaut allemand

Le château est violemment attaqué depuis le nord par les Allemands qui profitent du repli des éléments du 123e RI depuis Larbroye, repli qui met en danger le flanc gauche du 1er bataillon. Les combats sont acharnés et malgré la résistance farouche opposée par les défenseurs, les Allemands parviennent à pénétrer dans le château vers 11 heures en criant : “Franzosen Kaput !” Nullement impressionnés les hommes de la 2e compagnie du lieutenant Marcellin continuent le combat et lancent même une contre-attaque avec l’aide d’éléments de la 9e compagnie envoyés en renfort. A 13 heures, les Français sont à nouveau maîtres du château. Pourtant, une heure plus tard, un obus tombe sur un dépôt de munitions situé au sud du Mont Renaud provoquant des explosions en cascade qui menacent les défenseurs. Profitant de la confusion entraînée par cet incident, les Allemands relancent leur attaque contre le château depuis les abords est du promontoire. Une nouvelle fois, la détermination des défenseurs permet de les repousser en leur infligeant des pertes importantes.

Mont Renaud
Position détaillée du Mont Renaud

Le 27 mars, dès 7h05 du matin, le 57e RI demande le soutien d’un barrage d’artillerie pour stopper une nouvelle attaque allemande contre le Mont Renaud. Cette fois, les Allemands tentent de s’infiltrer à la jonction entre le 123e et le 57e RI à l’ouest du promontoire afin de le contourner. C’est une fois de plus un échec. Pourtant une heure plus tard, les Allemands repartent à l’assaut sur les pentes nord et nord-ouest tandis que d’autres éléments attaquent de front les positions du 123e RI pour le fixer. Mais rien n’y fait, les défenseurs tiennent bon tandis qu’une section de la 11e compagnie est déployée pour renforcer la gauche du 1er bataillon et assurer ses liaisons avec le 123e RI. A 16h30, l’artillerie allemande déclenche un violent bombardement sur le Mont Renaud ; il est immédiatement suivi d’un nouvel assaut de l’infanterie depuis l’Est. L’intervention de l’artillerie française stoppe net l’élan des assaillants. Malgré ce nouvel échec meurtrier, à 18h45, l’artillerie lourde allemande donne à son tour, en vain : une nouvelle vague d’attaque est repoussée. Une dernière tentative est faite à 19h45, mais elle subit le même sort que les précédentes grâce, une fois encore, à l’intervention de l’artillerie française. La défense héroïque du 1er bataillon aura coûté 9 tués et 27 blessés pour cette seule journée. Pendant trois jours les assauts allemands vont se répéter et ils sont tous repoussés. Les Allemands décident alors de mobiliser les éléments de 4 divisions d’infanterie pour s’emparer du secteur de Passel et du Mont Renaud et en finir avec les troupes françaises qui s’accrochent à ces positions sans esprit de recul.

Mont Renaud
Front tenu par le 57e RI

David contre Goliath

Le 30 mars à 6h55 au matin, des trombes d’eau s’abattent sur le secteur, mais cela n’empêche pas les Allemands de concentrer d’impressionnantes forces devant les positions des 57e et 123e RI. Pour s’emparer du Mont Renaud, qui résiste toujours depuis le 26 au matin, les Allemands envoient des troupes fraîches pour relever le 11e bataillon de l’Infanterie Regiment 135. C’est au tour du 1e bataillon de l’IR 98 de l’Infanterie Division 33 de mener l’assaut. Malgré la pluie, la concentration des unités allemandes n’échappe pas à l’observation des avant-postes français. Ceux-ci repèrent non seulement les fantassins ennemis, mais aussi une batterie d’artillerie qui se dévoile et ouvre le feu depuis les abords de Larbroye. Immédiatement, un tir de contre-batterie est effectué par l’artillerie française, mais les Allemands répliquent par un violent bombardement du secteur par d’autres batteries invisibles des défenseurs.

A 7h30, l’infanterie allemande forte d’au moins deux compagnies démarrent son attaque face au nord du mont ainsi que sur les pentes ouest. C’est dans ce secteur que les Allemands progressent le plus puisqu’ils atteignent le parc du château. Mais des éléments de la 11e compagnie du 57e RI sous les ordres du sergent Froment mènent immédiatement une contre-attaque à la baïonnette qui prend les Allemands de flanc. Les hommes du 57e RI font 22 prisonniers dont un officier et récupèrent trois mitrailleuses légères MG 08/15, mais ils déplorent 3 tués et 17 blessés. Vers midi, un avion allemand, probablement en mission d’observation, survole le Mont Renaud à basse altitude. Alors qu’il passe au nord-est de Passel, il est abattu par les mitrailleuses des 1er et 3e bataillons et s’écrase près du Mont Renaud où l’équipage composé d’un pilote et d’un observateur est capturé. Le pilote succombera à ses blessures au poste de secours.

Dans le même temps, les positions du 123e RI subissent elles aussi les assauts de l’IR 98. Dans la matinée, les Français repoussent quatre fois les Allemands dans le secteur de l’ancien Moulin situé au nord de Dive-le-Franc, même si par endroit la ligne française doit céder du terrain pour se réorganiser. Au cours du quatrième assaut, la 2e compagnie parvient même à faire 8 prisonniers. Là aussi, une contre-attaque menée vigoureusement par le bataillon de gauche du régiment permet de reprendre le bois des Séducteurs à l’ennemi. Malgré ce revers, les Allemands s’obstinent jusqu’à la fin de la journée et tentent encore trois nouvelles attaques qui sont toutes repoussées. Dans la nuit, l’échec des Allemands est patent, et les patrouilles envoyées en avant des lignes françaises confirment leur repli. Une fois encore, les Français ont tenu en infériorité numérique et préserver la route de Compiègne.

Mont Renaud
Anti-aérien V

BatailleDuMontRenaud, #HistoireMilitaire, #PremièreGuerreMondiale, #OffensiveAllemande, #DéfenseFrançaise, #Noyon, #ArtillerieFrançaise, #RésistanceHéroïque, #57eRI, #123eRI, #MontRenaud, #GénéralPellé, #StratégieMilitaire, #InfanterieFrançaise, #ContreAttaque, #ArtillerieAllemande, #GuerreDesTranchées, #CourageDesSoldats, #HistoireDeFrance, #MémoireMilitaire

Shares
Retour en haut