Opposition iranienne : Le grand entretien du Diplomate avec Davoud Pahlavi

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Davoud Pahlavi
Le Prince Davoud Pahlavi, un nouveau visage pour l’Iran démocratique. Il a crée la FONDATION AZADI et se consacre déjà à l’Iran de demain. Illustration Le Diplomate (Service Picto)

Troisième héritier présomptif au trône impérial d’Iran, opposant déclaré au régime des ayatollahs, Davoud Pahlavi est un prince iranien membre de la dynastie Pahlavi, exilé en France après la révolution de 1979. Fervent défenseur d’un Iran démocratique, il soutient la politique de son petit-cousin germain, Reza Pahlavi. Il analyse pour Le Diplomate l’état de l’opposition iranienne et la situation au Moyen-Orient.

Propos recueillis par Mathilde Georges

Le régime iranien est connu pour son soutien actif à des groupes comme le Hamas, les Houthis et le Hezbollah, qui jouent un rôle clé dans la déstabilisation du Moyen-Orient et sont souvent qualifiés d’organisations terroristes par la communauté internationale. Que pensez-vous de ce soutien, et quel impact cela a-t-il sur la position de l’Iran sur la scène internationale ? Cette stratégie de « guerre par procuration » face à Israël peut-elle se retourner contre le régime ? 

Il faut savoir que Khomeiny et Khamenei ont été formés par les Frères Musulmans bien avant la révolution de 1979. La théocratie iranienne se base sur la charia et sur la haine d’Israël. Ils sont profondément antisémites. Depuis le départ, la République islamique exerce sa domination et son expansion politique grâce à la création d’organisations millénaires. En effet, ils ont créé trois axes, le premier étant le plus important car il permet au pouvoir en place de tenir le peuple par la force. Le Corps des Gardiens de la Révolution qui est créé le 22 avril 1979 , trois semaines après le référendum qui valide la formation de la République islamique d’Iran. Et les deux autres axes sont expansionnistes à savoir le Hezbollah fondé en juin 1982 — entre autres par le mollah Ali Akbar Mohtashamipur, un proche de Rouhollah Khomeini. Et le Hamas qui lui a été fondé en 1987 après la première intifada en tant que branche politique et militante des Frères Musulmans palestiniens pour lutter contre “l’occupation israélienne”. La création en sous marin de ces organisations et le soutien constant de l’Iran à ces groupes terroristes est une composante clé de la politique étrangère de Téhéran visant à étendre son influence régionale et à contrer les intérêts des États-Unis et d’Israël au Moyen-Orient. L’Iran a en effet contribué à la déstabilisation de la région depuis le début de l’arrivé au pouvoir de l’Imam Khomeiny et notamment ces derniers temps avec l’attaque du  7 octobre par le Hamas télécommandé par les gardiens de la révolution, car juste avant cet épisode tragique, le régime des ayatollahs était à quelques encablures de sombrer, il fallait absolument détourner les yeux du monde sur la répression sanguinaire pour contrer la révolte du peuple et ainsi sauver leur pouvoir. Actuellement, leur seule arme consiste à créer le chaos à l’extérieur de leurs frontières, car ils savent qu’en cas de conflit ouvert avec les puissances occidentales, ils ne font pas le poids.

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Mais cette stratégie peut effectivement se retourner contre l’Iran si ses proxies provoquent des conflits majeurs ou si ses actions entraînent des conséquences graves pour la stabilité régionale. Cela pourrait également renforcer les efforts des pays hostiles à l’Iran pour contenir son influence et affaiblir son régime. En résumé, la clé de tous les problèmes se trouvent à Téhéran et contrairement aux apparences, la chute de ce régime peut intervenir à n’importe quel moment.

L’Iran traverse une grave crise économique, exacerbée par le rétablissement et le renforcement des sanctions occidentales, en particulier celles des États-Unis, après le retrait unilatéral de Washington de l’accord sur le nucléaire iranien en 2018. Ces sanctions ont entraîné une dévaluation significative de la monnaie nationale, provoquant une forte inflation et une diminution conséquente du pouvoir d’achat des Iraniens. Comment évaluez-vous l’impact de la situation économique désastreuse sur la stabilité du régime ? Pensez-vous que cela puisse accélérer sa chute ?

Les sanctions participent à la crise mais ne sont en aucun cas l’élément principal et déclencheur de la situation. Sous couvert d’une théocratie, les Ayatollahs – dont le maitre à penser, Khomeini (qui contrairement à la situation économique du peuple s’est construit un patrimoine de 95 Milliards $), était un admirateur du régime nazi – se sont en effet comportés, depuis 1979, d’une manière tyrannique et sanguinaire, dévastant l’économie, faisant main basse sur les richesses naturelles et industrielles du pays et persécutant les minorités ethniques et sexuelles, comme tous ceux qui ne pensaient pas comme eux. Ils ont institutionnalisé le trafic de drogue, d’armes et d’êtres humains, passant des accords avec des cartels mafieux en Colombie, au Venezuela et au Mexique. Le régime actuel grâce aux Gardiens de la révolution a, jusqu’à présent, réussi à maintenir son emprise sur le pouvoir grâce à une répression sévère de toute opposition et à un contrôle strict des médias et de l’information. Peu importe la situation économique, il tiennent le pays par la force et la terreur. La chute du régime dépendra plutôt de l’unité de l’opposition sur le territoire et en exil et d’un changement de vision de la part des grandes puissances. 

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De toute manière, la République islamique d’Iran est vouée à disparaitre, c’est une question de temps. Et les Iraniens ne veulent plus de l’Islam politique ni même des mollahs “réformateurs”, qui ont tant de sang sur les mains. Il faut donc en finir avec les vieux schémas et miser sur ceux qui incarnent l’avenir et la stabilité.

Alors que le régime iranien concentre ses efforts sur le conflit avec Israël qu’il menace d’attaquer, comment les Iraniens perçoivent-ils cette priorité, surtout dans un contexte de crise économique sans précédent ? Pensez-vous que cela alimente la colère populaire et pourrait déclencher de nouvelles manifestations, à l’image de celles qui ont suivi la mort de Mahsa Amini en 2022, malgré la répression sévère du régime ? Ce dernier peut-il maintenir son soutien aux Hamas, Hezbollah et Houthis tout en gérant les tensions internes croissantes dues à la détérioration des conditions de vie ?

Effectivement. Il est possible que le soutien continu du régime à ses alliés et sa priorité accordée aux enjeux régionaux suscitent davantage de ressentiment parmi la population iranienne, en particulier ceux qui sont directement affectés par la crise économique. La gestion simultanée des tensions internes croissantes et des engagements extérieurs pourrait représenter un défi pour le régime iranien, qui doit jongler entre les intérêts nationaux et régionaux pour maintenir sa légitimité et son contrôle. Mais les Gardiens de la révolution, tout comme le Hamas et le Hezbollah forment l’ADN de ce régime. Aujourd’hui, les yeux du monde est tourné sur le conflit avec Israël. C’était l’objectif de l’attaque du 7 octobre. Désormais, depuis cette date, passé au second plan, le peuple Iranien subit une répression sanguinaire dans un silence médiatique que je ne peux que regretter. Dans sa situation, le peuple est en mode de survie. Je pense qu’actuellement le peuple iranien qui s’est battu courageusement pour sa liberté ne comprend pas l’attitude des grandes puissances qui prônent la démocratie et se sentent de plus en plus abandonnés à leur sort. Ils ont besoin d’un espoir, d’un soutien extérieur. 

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L’opposition iranienne est fragmentée entre monarchistes, républicains, islamistes, marxistes et autres idéologies.  Pensez-vous qu’une coalition entre les différentes forces d’opposition est possible pour renverser le régime actuel ? Comment leur division peuvent-elles être surmontées pour créer un parti d’opposition uni ?

Rien n’est en effet plus important que de refuser la dictature d’un régime qui, depuis 44 ans, sous couvert d’une théocratie, se comporte d’une manière tyrannique avec son peuple. Contrairement aux idées reçues, les Iraniens de l’intérieur et ceux de la diaspora communiquent et travaillent plus que jamais la main dans la main, donnant une nouvelle impulsion pour un changement. Les différentes forces politiques existent, mais depuis 45 ans chacun défend ses idées et de ce fait, non seulement l’union ne s’est jamais construite, mais en plus nous avons déçu par nos divisions ceux qui ont combattu sur place. Désormais, nous devons construire notre union dans un premier temps sur notre premier objectif commun, à savoir la fin des ayatollahs au pouvoir. Nous devons construire une coalition entre les différentes forces d’opposition, nous devons redoubler nos efforts afin de créer un parti d’opposition uni regroupant toutes les forces politiques démocratiques.  

Que diriez-vous aux démocraties occidentales, notamment à la France, pour qu’elles soutiennent plus activement l’opposition iranienne ? Quels types de soutien seraient les plus efficaces ?

Je pense qu’il faut miser sur les leaders de l’opposition démocratique iranienne, quelle que soit leur sociologie politique, à commencer par le Prince Reza Pahlavi, charismatique et homme d’État dont le nom est de plus en plus scandé par les jeunes Iraniens qui voient en lui le symbole d’un avenir prometteur, car toujours ouvert au dialogue.  Il faut comprendre que le combat pour un Iran “libre” qu’il mène avec force, est en effet celui des démocraties occidentales, à commencer par la France. Il est aussi celui des 10 millions d’Iraniens qui vivent en exil à travers le monde, etforment une puissance économique et sociale à la hauteur d’un pays comme la Suisse.

Dans mon cœur, la France mais aussi l’occident occupe une place importante. Et dans mon esprit, la France et ceux qui incarnent l’Iran de demain doivent plus que jamais se rapprocher pour préparer l’avenir, et construire de nouveaux liens économiques, mais aussi pour œuvrer pour la paix et la stabilité au Moyen-Orient. 

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Selon nos calculs et notre vision, il y aura dans l’Iran de demain des chantiers de développement extraordinaires. Un rebond économique et social nous permettra des échanges très optimistes et de nouvelles perspectives pour nos entreprises respectives. Mais, pour que tout cela prenne forme, dans un moment de notre histoire commune où nous sommes confrontés à des bouleversements géopolitiques sans précédent, l’urgence réclame que soit enfin écoutée la parole de ceux qui combattent la terreur islamiste en Iran. Le soutien à l’opposition iranienne peut prendre différentes formes, telles que la diplomatie, la pression économique, les sanctions ciblées par exemple en traduisant le Corps des Gardiens de la Révolution devant la justice pour crimes contre l’humanité, la sensibilisation internationale, et le soutien aux groupes de la société civile et aux défenseurs des droits de l’homme en Iran. Il est important que les démocraties occidentales évaluent soigneusement les options disponibles et agissent de manière coordonnée pour soutenir les aspirations démocratiques du peuple iranien.

Le régime actuel en Iran entretient des relations étroites avec des puissances comme la Russie et la Chine. Si le régime venait à tomber, comment voyez-vous les relations futures de l’Iran avec ces pays ? Devraient-elles être réévaluées dans un Iran démocratique ?

Il est important que tout changement de gouvernement en Iran soit accompagné d’un dialogue constructif avec la communauté internationale pour promouvoir la paix, la stabilité et le respect des droits de l’homme en Iran. Nous allons devoir construire et reconstruire, nous renforcer dans bien des domaines.  Je pense tout particulièrement à l’environnement avec le réchauffement climatique, revoir également nos institutions pour remettre de l’économie dans l’économie afin de nous renforcer et de nous développer significativement dans tous les secteurs d’activités. Dans un souci d’ouverture sur le monde, nous maintiendrons nos relations économiques avec la Chine et la Russie tout en nous ouvrant à d’autres comme à tous les pays du Moyen-Orient ainsi qu’Israël et principalement avec nos anciens partenaires du développement, l’Europe et les États-Unis. 

Votre fondation, la Azadi Foundation, soutient la vision de Reza Pahlavi pour un Iran libre, démocratique, laïque et prospère. Pouvez-vous nous expliquer les initiatives concrètes que vous mettez en place pour promouvoir cette vision, et comment vous mobilisez la diaspora iranienne ?

Il y a près d’un mois, nous avons eu une réunion entre les différentes forces d’oppositions à Londres. Il me semble important que l’opposition iranienne se rassemble d’une manière significative et en ordre de bataille. Nos politiques ont besoin de soutien démocratique de la part notre population en exil mais aussi en Iran. Notre union doit être humain, physique, intellectuel, financier, social et militaire et doit être basé sur la loyauté de chacun. La fragmentation de l’opposition entre différentes idéologies et factions constitue en effet un défi majeur pour la création d’une coalition efficace visant à renverser le régime actuel. Cependant,  la “fondation Azadi” que nous avons créé a pour vocation de surmonter les divisions afin d’envisager des structures démocratiques fortes et crédibles face à nos engagements. J’ai donc le plaisir de vous annoncer que nous sommes au départ d’un rassemblement, d’une union unique et démocratique en soutien total à mon cousin Prince Reza Pahlavi qui est le seul à lutter actuellement.
L’ambition de l’association est de créer un parti politique démocratique. Nous croyons fondamentalement qu’une base démocratique à l’échelle mondiale doit émerger assez rapidement pour que nous puissions donner du poids à notre leader dans ses déplacements diplomatiques à travers le monde. Plus nous serons nombreux, plus nous serons pris au sérieux et plus nous deviendrons incontournables aux yeux des grandes puissances. Nous nous accordons le temps nécessaire de discuter avec chacun en amont afin de mettre en place et dans la lumière notre rassemblement politique démocratique. 

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Les priorités importantes à mettre en place sont :

  1. Leadership unifié : coordination et vision politique et stratégique commune.
  2. Plateforme politique commune 
  3. Diversité politique au service d’un objectif : la libération de l’Iran 
  4. Stratégie de communication visant la cohérence au sein de l’opposition.

Si nous ne voulons pas attendre 45 ans de plus, si nous voulons un changement radical et combattre la République Islamique, il n’y a pas d’autres alternatives que celui d’un parti d’union démocratique et laïque au service d’un leadership.


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