Par Catherine Massaut, ancienne magistrate
Le chauffard, un “motard” de 19 ans qui se livrait, selon plusieurs témoignages, à du rodéo urbain, a percuté une fillette de 7 ans qui traversait la rue avec son frère sur le passage clouté, lui occasionnant de très graves blessures.
Il été mis en examen pour blessures involontaires aggravées et laissé libre sous contrôle judiciaire.
Il encourait 5 ans d’emprisonnement car c’est un délit.
Le juge des libertés et de la détention n’a pas suivi l’avis du parquet, qui réclamait son placement en détention provisoire.
Le magistrat a estimé que le profil du suspect – il n’était positif ni à l’alcool, ni aux stupéfiants et inconnu de la justice et de la police – et ses garanties de représentation ne justifiaient pas sa détention.
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Le parquet a interjeté appel de cette décision et une audience se tiendra le 10 septembre à la cour d’appel d’Aix-en-Provence.
La Chambre de l’instruction tiendra lieu de juge des libertés et de la détention.
L’article 144-2 du CPP prévoit plusieurs critères pouvant justifier le placement en détention : ⁃ la nécessité de conserver les preuves, ⁃ Celle d’empêcher les pressions sur les témoins ou les victimes, ⁃ la protection du mis en examen, ⁃ L’empêchement de toute concertation frauduleuse avec des complices ou témoins, ⁃ La garantie de la personne mise en examen à la disposition de la justice : or, en l’espèce, il y a risque de fuite puisque le mis en examen encourt 5 ans d’emprisonnement.
Ne serait-ce que pour cette raison, le mis en examen aurait dû être placé en détention provisoire. Mais pas seulement.
Il semble que le JLD du tribunal judiciaire n’ait pas lu la totalité de l’article 1244-2 du CPP, omettant ainsi un alinéa majeur :
En effet, l’article 144 al 6 du CPP dispose que la détention provisoire peut être prononcée par le JLD pour : ” Mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement”.
Voilà pourquoi il aurait fallu d’emblée, placer le mis en examen en détention provisoire : Parce qu’il y a risque que ce criminel, libre après un rodéo urbain qui a tué une fillette, l’égo gonflé de son impunité, recommence son cirque par défit, fierté, stupidité ou pour son seul plaisir et commette ce que l’on appelle une réitération des faits, soit de nouveaux faits identiques avant d’avoir été condamné soit hors cadre de la récidive.
Un JLD consciencieux se serait appuyé sur cet alinéa 6 de l’article 144-2 susvisé pour protéger de potentielles victimes de ce fou du volant – de rodéo- Pour ce magistrat inconséquent, la liberté d’un délinquant routier dangereux est plus importante que les graves blessures et les souffrances endurées par une fillette innocente.
Succombant à ses blessures, Kamylia est morte le lendemain.
Liminairement, les faits délictueux devraient donc faire l’objet d’une requalification en homicide involontaire.
Cette requalification, doit, si elle s’opère, être soumise au mis en examen pour lui laisser le temps de préparer sa défense, par application du principe du procès équitable.
(Article 388 du code de procédure pénale).
Au cas d’espèce, la sanction encourue va de 7 à 10 ans selon qu’une ou deux circonstances aggravantes seront retenues (en l’espèce une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence / Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h), soit une peine qui peut être deux fois plus lourde.
A l’occasion de l’audience à venir se posera à nouveau la question de la détention provisoire à l’aune de cette requalification qui lui aura été soumise.
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Le décès de la fillette peut-il pousser la justice à incarcérer le motard ?
Théoriquement, non car l’homicide involontaire – même aggravé – reste un délit, punissable de dix ans d’emprisonnement (lorsque deux circonstances aggravantes ou plus sont réunies).
Toutefois, la mort de la victime pourrait inciter la chambre d’instruction à modifier son angle de vue et considérer par exemple, que compte tenu de la peine encourue, la représentation de l’auteur des violences involontaires mortelles est encore moins garantie eu égard à la lourdeur de la peine encourue.
Il est cependant à craindre, au vu de la politique laxiste de la justice, que le décès de l’enfant ne changera pas l’esprit gangrené d’idéologie de certains magistrats, dont celui du JLD qui qui semble n’avoir pas dépassé l’alinéa 5 de l’article 144-2 du code de procédure pénale.
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Puissions-nous espérer que la chambre d’instruction prendra la peine de s’interroger sur l’opportunité de l’application de cet alinéa 6 que le premier juge a superbement ignoré et prononcera la détention provisoire du mis en examen, lequel involontairement certes, a tué la petite Kamylia qui ne fera plus de rentrée des classes…
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