Le grand entretien du Diplomate avec Stéphane Goldin : « L’Iran ne souhaite pas s’engager dans un conflit qui pourrait amener la chute du régime des Mollahs »

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Stéphane Goldin Israël à Gaza

Stéphane Goldin est un ancien des forces spéciales israéliennes et spécialiste des questions de sécurité. Pour Le Diplomate, il répond à nos questions afin d’analyser la situation brûlante et actuelle au Moyen-Orient…

Propos recueillis par Angélique Bouchard

Le Diplomate : Quelle est votre évaluation de la stratégie militaire actuelle d’Israël dans sa lutte contre le Hamas à Gaza ? Quelles sont les principales priorités sécuritaires dans cette campagne ? Après un an est-ce un succès ou un échec ?

Stéphane Goldin : Cette guerre à Gaza n’est pas encore terminée tant qu’il y aura des poches de terroristes et que nous n’aurons pas ramené l’ensemble des otages en Israël. Cette guerre a été inédite car c’est la première fois dans le monde qu’un pays doit se battre non pas face à un autre pays ou à une armée, mais face à des terroristes, non pas en surface mais souvent sous terre et enfin face à des terroristes qui détiennent des otages comme boucliers humains. Actuellement, la stratégie de Tsahal à Gaza est celle de la tactique de la cocotte-minute, c’est-à-dire encercler et refermer le cercle autour des terroristes tout en les pressurisant au maximum.

La priorité reste le retour des otages en Israël et l’élimination militaire du Hamas et des autres mouvances terroristes dans la bande de Gaza, le but étant de resécuriser le sud d’Israël et redonner à la population du sud la possibilité de vivre sereinement et sans danger. Quand toutes ces priorités seront actées, nous pourrons dire que c’est un succès.

LD : Le Hezbollah, soutenu par l’Iran, est souvent perçu comme l’autre menace majeure pour Israël au nord. Qu’en est-il de ses forces après la dernière intervention de Tsahal au Liban ? Pensez-vous qu’une escalade avec le Hezbollah soit inévitable, et comment Israël pourrait-il adapter sa stratégie pour faire face à une guerre sur deux fronts ? Et comment est perçu cette opération par les autres communautés du Liban ?

SG : Israël à la capacité opérationnelle de faire face à plusieurs fronts simultanément. Je regrette que nous ayons attendu aussi longtemps pour nous attaquer au Hezbollah qui depuis le 8 octobre n’arrête pas de tirer des missiles, roquettes, drones sur Israël.

Le Liban, ce n’est pas Gaza et le Hezbollah n’est pas le Hamas. La topographie du Liban est bien plus complexe et les terroristes du Hezbollah sont bien plus nombreux et bien mieux entraînés que ceux du Hamas, sans parler de leur arsenal.

Il va de soi qu’Israël ne doit pas faire les mêmes erreurs de la première et seconde guerre du Liban en restant pour une longue période sur le territoire libanais. Tsahal doit continuer à « nettoyer » le sud Liban en s’attaquant à tout ce qui touche de près ou de loin au Hezbollah.

L’organisation terroriste chiite est actuellement très désorganisée suite à un nombre d’éliminations sans précédent et il n’y a qu’en maintenant cette pression qu’un accord politique pourrait voir le jour. Beaucoup de Libanais le souhaitent et ne veulent plus voir leur pays dirigé par un groupe terroriste, proxy de l’Iran.

LD : La mort de Yaya Sinouar, l’un des principaux leaders du Hamas, aurait-elle un impact significatif sur la structure de commandement et la capacité opérationnelle du Hamas à Gaza ?

SG : Au-delà de l’impact « émotif » pour les terroristes du Hamas, il n’y aura aucun changement dans la doctrine du Hamas ni dans sa volonté de continuer la guerre.

LD : Israël doit encore gérer le sort des otages détenus par le Hamas. Quelle stratégie pensez-vous qu’Israël adoptera pour tenter de les libérer, tout en poursuivant ses objectifs militaires ? A-t-elle changé depuis 1 an ?

SG : La très grande majorité de la population israélienne souhaite un accord pour le retour des otages en Israël. Cela doit être notre priorité tout en maintenant une pression militaire sur la bande de Gaza afin de sécuriser le sud d’Israël. Mais pour obtenir un accord, il faut être deux, or, pour le moment, le Hamas refuse toutes avancées.

LD : L’Iran reste un acteur clé dans cette région, à la fois pour son soutien au Hezbollah et au Hamas. Pensez-vous qu’un conflit direct entre Israël et l’Iran soit envisageable à moyen terme, et comment cela pourrait-il reconfigurer l’équilibre stratégique au Moyen-Orient ?

SG : L’Iran ne souhaite pas s’engager dans un conflit qui pourrait rabaisser ses velléités à vouloir contrôler le Moyen-Orient et qui pourrait amener la chute du régime des Mollahs.

Israël et le monde libre doit s’attaquer à l’Iran, mère patrie du terrorisme islamique internationale, en touchant son point faible : son économie. L’Iran vit grâce à son pétrole et son gaz. En touchant ce point névralgique, l’Iran ne pourra plus financer le terrorisme islamique ni son programme nucléaire. Il est temps que le monde « libre » comprenne cette équation.

LD : Après cette année de conflit intense, quels sont, selon vous, les scénarios possibles pour une paix durable au Moyen-Orient ? Y a-t-il une voie réaliste vers une stabilisation de la région, ou devons-nous nous attendre à une intensification des tensions dans les années à venir ?

SG : Lors des différentes attaques iraniennes sur le territoire israélien, nous avons pu voir des liens se concrétiser entre certains pays arabes comme l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes Unis, la Jordanie et Israël. Cela veut dire qu’il y a un espoir de redéfinir une stabilité régionale mais pour cela, il faudra une coalition internationale pour éliminer le régime des Mollah en Iran et redonner la liberté au peuple iranien qui s’oppose à cette autocratie.

LD : La guerre actuelle a-t-elle provoqué un bouleversement des alliances régionales, notamment en ce qui concerne les accords d’Abraham et les relations entre Israël et certains pays arabes ? Voyez-vous des opportunités ou des obstacles à de nouvelles coopérations régionales dans ce contexte ?

SG : Les accords d’Abraham ne vont que s’intensifier dans les années à venir. Il y a aujourd’hui de nouvelles alliances qui pourraient entrainer de nouveaux accords. Il y aura probablement un nouvel élan après les élections américaines. Compte tenu de la crise mondiale, chaque pays a besoin de trouver de nouveaux alliés et Israël est un nouvel allié de ceux qui le considérait comme un pays ennemi il y a encore peu.

À lire aussi : L’Entretien du Diplomate avec Stéphane Simon sur son livre :


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