Tribune – Budget 2025 : on taxe, on ponctionne, on se détend…

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Le mois de Novembre s’écoule gentiment pendant que les discussions sur tous les aspects budgétaires continuent dans des envolées lyriques et de fines remarques de nos excellents députés. Les deux chambres sont en ébullition, et on sent chacun de nos fiers représentants arc-boutés pour sauvegarder le moindre de nos intérêts, tendus dans le but de rendre chaque jour l’État plus efficace, tout en limitant tant que possible la ponction fiscale. Mais si.

Les objectifs sont clairs, les jalons fixés et les trois points suivants sont maintenant acquis : 1 – les retraites sont devenues sacrées, 2 – les impôts peuvent encore augmenter (« Vas-y, Michel, ça passe large ! ») et enfin 3 – la résilience française est telle qu’envisager la moindre coupe dans les dépenses est vu comme une plaisanterie de mauvais goût.

1. On ne touche pas aux retraités

La Macronie a bien compris que l’intégralité de sa légitimité (de plus en plus évanescente) est tirée d’un nombre pourtant décroissant de retraités encore favorable au statuquo. C’est donc sans surprise que la journée d’esclavage de solidarité a été votée par le Sénat avec d’autant plus de décontraction que les députés et les sénateurs ne sont pas concernés par cette solidarité qui ne s’appliquera pas – Ooouf – à leur indemnité.

On peut se demander ce qui pourrait se passer si, d’aventure, des masses de Français facétieux refusaient de travailler juste ce jour-là, voire de poser une journée de RTT ou de vacances, sans même évoquer ceux qui pourraient tomber malencontreusement malade ou ceux qui auraient l’idée intéressante de faire grève. Dans ces cas, quelle richesse pourra-t-on retirer de cette journée ?

En attendant et parallèlement, après d’âpres négociations entre Barnier (Macron en version vieux) et Wauquiez (qui a du mal à représenter autre chose que lui-même, et encore), on a définitivement enterré l’idée d’économie qui aurait consisté à ne pas toucher aux retraites du tout, c’est-à-dire à ne pas les indexer sur l’inflation et permettre ainsi un transfert de richesse un peu moins violent entre la population active et la population retraitée. Au contraire, il a été décidé d’une petite revalorisation par ci, d’une indexation par-là, et petit-à-petit, l’effort porté sur les populations actives continue de gonfler en toute désinvolture.

2. On augmente les impôts tous azimuts

Bon, inutile de lister ici toutes les mesures qui seront mises en place dans les prochains mois pour tabasser avec soin le contribuable à chaque coin de rue, la presse s’en charge au fil des jours. Notons cependant l’ironie mordante du mécanisme de bonus/malus CO2 et au poids sur les véhicules : son renforcement assez violent ayant été rejeté par les députés pour les voitures neuves, ces derniers proposent à présent de l’appliquer l’année prochaine rétroactivement sur les véhicules d’occasion

Oui oui, sur l’occasion, et oui oui, rétroactivement. Vous avez bien lu.

Celui qui voudra s’infliger une migraine pourra lire l’article 9 de cette nouvelle cathédrale à mazout de législation tordue pour prendre toute la mesure de la psychopathologie qui s’est emparée du législateur lorsqu’il s’est lancé dans la recherche de nouvelles taxes juteuses. Il faut bien comprendre qu’on n’en est encore qu’aux premières étapes d’une loi de finance mal boutiquée dont on se doute déjà qu’elle terminera avec des intromissions douloureuses.

Et alors qu’avec des malus atteignant des sommets, il deviendra rentable pour certains modèles de l’acheter à l’étranger pour rouler en France sans jamais le faire réimmatriculer, la prune étant alors bien moins coûteuse, tout indique que posséder un véhicule, chose déjà périlleuse ces dernières années, va passer dans le camp du luxe pur et simple dans l’Hexagone.

Les provinciaux campagnards devront faire avec les mobylettes, les cars et les TER (quand ils roulent encore) et les autres pourront toujours se rabattre sur les transports en commun citadins, donnant à la France un petit air d’Allemagne de l’Est de 1970 que l’Allemagne elle-même, actuellement en plein effondrement grâce à de vigoureuses politiques écologiques, nous enviera bientôt.

Au passage, on devra d’ailleurs se poser la question de la rentabilité de ces taxes puisqu’à mesure qu’elles augmentent, les ventes dégringolent, ruinant pour l’État tout espoir de collecter suffisamment de taxes, ce qui promet au passage d’intéressants développement pour certaines villes qui envisagent d’interdire les SUV, ces véhicules qui ne seront plus achetés que par les trafiquants de drogue, seuls encore capables dans le pays de se payer ce genre de véhicules.

3. On ne fait surtout aucune coupe !

Quant à l’idée budgétaire véritablement extra-terrestre qui consisterait à couper dans les dépenses accessoires, inutiles ou simplement trop coûteuses, elle ne sera abordée par personne.

Ainsi, la maire de Nantes Johanna Rolland a courageusement refusé le moindre effort budgétaire au niveau des communes, jugeant que c’était à l’État de montrer l’exemple. Or, s’il est vrai que ce dernier a largement dépassé toutes les bornes ces 20 dernières années, la maire de Nantes depuis 2014 n’est pas exactement exempte de défauts en matière de gestion, avec une dette qui augmente assez sensiblement ces 5 dernières années dans une ville à l’insalubrité et l’insécurité galopantes…

D’autres villes ont choisi d’afficher un bon vieux « syndrome du Washington Monument » que j’exposais récemment dans un précédent billet : par exemple, Lille lance une belle campagne d’affichage pour expliquer que les coupes budgétaires sont impossibles essentiellement parce que cela reviendrait à ne plus nourrir les enfants à la cantine, oubliant sans doute de préciser que l’écrasante majorité de son budget ne passe pas dans ces cantines mais dans ses nombreux pousse-papiers et autres tamponneurs de cerfas de l’administration municipale dont le poids, d’années en années, augmente gentiment, ou dans ces programmes bigarrés destinés à des populations spécifiques mais ultraminoritaires (depuis les cyclopathes jusqu’aux migrants en passant par les artistes en mal de déstructuration d’intemporel).

Il va de soi que ces arguments en carton actuellement utilisés par les communes pour protéger leurs budgets et ne surtout faire aucune coupe seront tout autant utilisés par les départements, les régions et l’État lui-même pour expliquer pourquoi aucune dépense ne sera réduite voire stoppée.

Non, vraiment, la fête n’est pas finie et de toute façon, les petits-fours ont été commandés et devront bien être consommés, hein, ma brave dame, sinon ce serait gâcher de la bonne nourriture.

Ce pays est foutu.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne représentent en aucun cas la position éditoriale du Diplomate

À lire aussi : Tribune – Et maintenant, l’effondrement français


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