Par Angélique Bouchard
Les Républicains du Congrès prévoient de travailler en étroite collaboration avec le PDG de Tesla, Elon Musk et l’ancien candidat à la présidentielle Vivek Ramaswamy, les deux dirigeants du nouveau Département de l’efficacité gouvernementale, le DOGE.
Le duo a fait sa tournée auprès des législateurs à Washington, DC, passant la matinée avec leurs plus proches soutiens, les membres du caucus DOGE du Sénat, avant de se rendre à une réunion avec les dirigeants du GOP de la Chambre des représentants.
Musk et Ramaswamy dirigeront tous leurs efforts sous le second mandat Trump pour réduire les dépenses gouvernementales et renforcer l’efficacité de la nouvelle administration. Ils ont conclu leur journée au Capitole en s’exprimant lors d’une réunion conjointe avec les Républicains issus des deux chambres. Musk a déclaré qu’il y aurait une liste de « vilains » et une liste de « gentils » parmi les législateurs.
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Jeudi 19 décembre dernier, la dette nationale américaine s’élevait à 36 167 604 149 955, 61 dollars et n’a cessé de grimper depuis.
« Il y a tellement de gaspillage, de fraude et d’abus. Il y a tellement d’inefficacité. Par où commencer ? »
Telle a été la déclaration du coprésident du Caucus DOGE, le représentant républicain de Floride, Aaron Bean. La grande discussion avec Musk et Ramaswamy a essentiellement porté sur le fonctionnement de l’éducation et le licenciement des employés du gouvernement.
« Des fruits sont déjà à portée de main » pour améliorer l’efficacité du gouvernement sur lesquels les Républicains pourraient s’entendre, notamment sur l’éducation et la gestion de la main d’œuvre fédérale.
« Il y a eu une grande discussion sur l’éducation. Il y a eu une grande discussion sur le licenciement des fonctionnaires du gouvernement tel qu’il existe dans les programmes à travers le pays. Il ne s’agissait pas de choisir son programme, de le sélectionner et d’obtenir un accord. C’était un forum d’idées » a déclaré le coprésident, le représentant Pete Sessions, Républicain du Texas.
Si certains républicains ont affirmé, à l’issue de ces premières consultations, vouloir « éviscérer le poisson », d’autres se sont montré plus pragmatiques en faisant valoir qu’il serait « bon d’avoir un œil extérieur sur la manière dont le gouvernement fédéral est géré ».
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Le calendrier des mesures pilotées par le DOGE, qui contribueront à garantir l’efficacité de l’agence, devrait se terminer au plus tard, le 4 juillet 2026, à l’occasion du 250 ème anniversaire de la signature de la Déclaration d’indépendance.
La sénatrice Joni Ernst, Républicaine de l’Iowa et présidente du groupe DOGE du sénat, a présidé la réunion avec les sénateurs pour dévoiler le 19 décembre dernier une proposition de réduction des coûts de 60 pages. Ernst a notamment proposé que le gouvernement fédéral délocalise la main-d’œuvre de Washington vers les territoires et que le Congrès fixe un objectif que toutes les agences du gouvernement fédéral atteignent un taux d’occupation quotidien de 60% de leur siège.
Le rapport Ernst a révélé que seulement 6% des fonctionnaires et agents publics travaillent à temps plein à Washington et que près d’un tiers d’entre eux travaillent à distance (Source : GOP senators « very impressed » with Musk Ramaswamy DOGE framework amid meetings on Capitol Hill, par A. Spady, E. Elkind et C. Creitz, Fox News, 5 décembre 2024).
« DRAIN THE SWAMP »
La sénatrice Ernst, encouragée par Musk, dirige un projet de loi intitulé « Loi sur la décentralisation et la réorganisation de l’infrastructure des agences à l’échelle nationale pour exploiter des services efficaces, une administration de la main d’œuvre et des pratiques de gestion ».
La mesure autoriserait le Bureau de la gestion et du budget (OMB) à relocaliser à 30% du personnel des agences fédérales vers des lieus autres que la zone métropolitaine de Washington, DC.
De plus, le reste des fonctionnaires fédéraux restés dans la capitale, seraient tenus de travailler, en présentiel, 100% du temps de travail. En vertu de son projet de loi, l’OMB serait également chargé de travailler à la vente des espaces inutiles créés par des délocalisations.
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Les enquêtes de la sénatrice auraient révélé que les bureaucrates de Washington, DC, feraient à peu près ce qu’ils veulent durant leur journée de travail.
« Les employés fédéraux ont montré qu’ils ne voulaient pas travailler à Washington, et dans l’esprit de Noël, je fais en sorte que leur souhait devienne réalité. Au lieu de les enliser dans « le marais », je m’efforce d’amener les bureaucrates au-delà du périphérique de Washington, à rappeler aux fonctionnaires pour qui ils travaillent (…) En plus d’améliorer le service public pour tous les Américains, nous pouvons offrir aux contribuables un cadeau de Noël supplémentaire en vendant des immeubles de bureaux inutilisés et coûteux » précise Ernst.
Avec le lancement du DOGE, sous la férule de Musk, la Républicaine de l’Iowa semble prête à agir en reprenant le canevas d’idées spécifique, exposé par le président élu, Donald Trump. Un projet de loi complémentaire est présenté à la Chambre par le représentant Aaron Bean, Républicain de Floride et co-dirigeant du caucus DOGE de la chambre basse.
« Le marécage est tellement épais et profond, ici, à Crazy Town, que je suis obligé de l’assécher. Il est temps de rappeler à Washington que notre devoir est de servir le peuple américain. Je suis fier de rejoindre le sénateur Ernst pour garantir que le gouvernement travaille pour le peuple et non, l’inverse » a- t-il déclaré dans un communiqué. (Source : DOGE Caucus leader Joni Ersnt eyes relocation out of DC for third of federal workers, par Julia Johnson, Fox News, 19 décembre 2024).
« Apparemment, l’Amérique a élu Elon Musk, président. Trump n’est que le garçon de courses »
Telle est la vision que partage le représentant Mark Pocan, Démocrate du Wisconsin, sur le réseau social X, après le revers essuyé par le président de la Chambre des représentants, Mike Johnson au sujet d’un projet de loi visant à limiter les dépenses gouvernementales.
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Les négociateurs républicains de la Chambre des représentants sont parvenus provisoirement à un accord le 20 décembre dernier pour éviter un « shutdown » partiel du gouvernement. Ce implique également un accord pour agir sur la limite de la dette en 2025, dans le cadre de la refonte massive de la politique conservatrice envisagée par le Républicains, grâce à un processus de « réconciliation ».
Cette nouvelle stratégie intervient après que le Président élu et ses proches aient torpillé les plans initiaux des législateurs du Congrès. Donald Trump avait en effet appelé les Républicains à agir en faveur d’une stricte limite de la dette nationale, une demande qui a irrité une dizaine de législateurs conservateurs du GOP, étant donné leurs inquiétudes concernant une dette qui a dépassé les 36 000 milliards de dollars.
Le plan du président de la Chambre des représentants, Mike Johnson, Républicain de Louisiane, visant à suivre les directives du président Trump, a été mis en échec. Trump, Musk et Ramaswamy ont été les fers de lance de l’opposition visant à annuler l’accord bipartisan, forçant même les législateurs qui le soutenaient, à quitter leurs fonctions. Ce projet de loi, long de 1 547 pages aurait maintenu les financements du gouvernement américain à leurs niveaux actuels, et ce, jusqu’au 14 mars 2025. Cependant, les Républicains partisans de la ligne dure du GOP, se sont insurgés par des mesures qu’ils considéraient comme sans rapport avec le projet de loi initial, comme une augmentation des salaires pour les législateurs du Congrès, des dispositions sur la politique de santé et une législation visant à rénover les stade RFK à Washington, DC. La deuxième version était beaucoup plus courte avec 116 pages. Elle excluait le projet de loi sur le stade et l’augmentation des salaires des membres du Congrès, mais incluait toujours des mesures pour reconstruire le pont Francis Scott Key de Baltimore et plus de 100 milliards de dollars d’aides en cas de catastrophes naturelles. Les médias libéraux et les législateurs démocrates ont dès lors accusé Musk, le « président fantôme », de s’emparer des rênes de la présidence, en dirigeant l’opposition conservatrice contre l’accord bipartisan initial.
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« Vos représentants élus vous ont entendus et maintenant, le terrible projet de loi est mort. La voix du peuple a triomphé ! VOX POPULI. VOX DEI » a posté Elon Musk, le 18 décembre dernier sur le réseau social X. « Elon Musk est le gars qui dirige vraiment les choses. Il n’est pas seulement le coprésident de Trump. Je pense que c’est un titre bien trop bas (…) C’est le chef en charge et les Républicains de la Chambre savent certainement de qui viennent les ordres. » a déclaré le journaliste politique Chris Hayes de MSNBC (Source : https://www.yahoo.com/news/chris-hayes-says-elon-musk-032433037.html).
L’analyste politique Jen Psaki a exprimé une vue similaire, suggérant que Musk pourrait commencer à « éclipser » Trump et par la même occasion, risquer par inadvertance de s’attirer le mépris du président élu : « Elon Musk est tout le temps avec Trump. Il était sur cette photo, c’était lors du match Army-Navy, un peu bizarrement juste derrière son épaule. Il semble vivre à Mar-a-Lago. Je ne sais pas ce que Trump en pense. Peut-être qu’il s’amuse en ce moment. Est-ce que cela va durer ? On lui attribue également le mérite d’avoir du pouvoir sur le Congrès, sur Trump. Comment cela se passe-t-il avec Trump ? Nous avons appris de l’Histoire, qu’en général, cela ne se passe pas bien ». (Source : Plan E: Elon Musk Fuels GOP Chaos as Congress Barely Averts Shutdown- Inside with Jen Psaki, 22 décembre 2024, https://podcasts.apple.com/eg/podcast/plan-e-elon-musk-fuels-gop-chaos-as-congress-barely/id1692806415?i=1000681323475)
Whoopi Goldberg, dans l’émission « The View » d’ABC a abordé, pour sa part, la thèse de la conspiration. Qui est réellement à la tête du premier cercle de Trump ? Musk et le vice-président élu, JD Vance pourraient « comploter » contre Trump. Goldberg est même allée plus loin en affirmant que les deux hommes pourraient conspirer pour tuer le président entrant : « Hé, tu sais qui ; reste loin des escaliers » lance la comédienne dans un fou rire (Source : https://www.foxnews.com/video/6366237948112). Certains commentateurs politiques s’interrogent. Ce n’est pas Trump qui aurait demandé que le projet de loi républicain soit abandonné, mais plutôt Musk. Dans son podcast politique, David Axelrod, souligne les divergences de vue entre les deux hommes sur le projet de loi : « Ce qui me trouble, c’est que Musk a notifié dans un de ses tweets que personne ne devrait bouger avant le 20 janvier, quand Trump sera là. Trump, lui, a envoyé un tweet disant que les Républicains devraient adopter un CR propre avec un plafond de dette- en augmentant le plafond de la dette parce que …- il ne veut pas être blâmé pour cela. Donc ils semblent dire des choses différentes et finalement, ils vont devoir se réunir et décider qui sera le président » (Source : Congress Barrels Toward Shutdown, Anderson Cooper 360°, https://podcasts.apple.com/fr/podcast/congress-barrels-toward-shutdown/id425179503?i=1000681054866).
Le président élu Donald Trump a répliqué aux accusations en réaffirmant son opposition catégorique au projet de loi, mercredi 18 décembre dernier, à travers une série de publications sur Truth Social :
« Il semble que la ridicule et extrêmement coûteuse résolution de prolongation, PLUS, soit en train de mourir rapidement, mais peut-on imaginer la faire passer sans mettre fin à la sentence de la guillotine que représente le plafond de la dette, qui doit intervenir en juin ? A moins que les Démocrates ne mettent fin ou n’accroissent le plafond de la dette, maintenant, je me battrai jusqu’au bout. C’est un méchant piège, mis en place par les Démocrates de gauche radicale ! » (Source : Democrats, media allies push talking point that Elon Musk is truly incoming president instead of Trump, par Nikolas Lanum, Fox News, 20 décembre 2024).
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Diplômée de la Business School de La Rochelle (Excelia – Bachelor Communication et Stratégies Digitales) et du CELSA – Sorbonne Université, Angélique Bouchard, 25 ans, est titulaire d’un Master 2 de recherche, spécialisation « Géopolitique des médias ». Elle est journaliste indépendante et travaille pour de nombreux médias. Elle est en charge des grands entretiens pour Le Dialogue.