Par Giuseppe Gagliano, Président du Centro Studi Strategici Carlo De Cristoforis (Côme, Italie). Membre du comité des conseillers scientifiques internationaux du CF2R.
L’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche en 2017 a marqué le début d’une relation tumultueuse avec la communauté du renseignement américain. L’un des épisodes les plus emblématiques remonte à son premier jour en tant que président, lorsqu’il s’est rendu au siège de la CIA à Langley, en Virginie. Ce qui aurait pu être un moment solennel pour instaurer la confiance s’est transformé en une démonstration de vanité politique : devant le Memorial Wall, dédié aux agents tombés en service, Trump a parlé de la foule présente à son investiture, détournant l’attention des sacrifices de l’agence vers ses propres plaintes sur les médias.
Cet épisode n’était qu’un prélude à une relation marquée par une méfiance réciproque. Durant son premier mandat, Trump a accusé la communauté du renseignement de faire partie d’un “deep state” hostile à son administration, alimentant des théories du complot et semant des divisions internes. Avec son retour à la présidence, la situation risque de se détériorer davantage, notamment à cause de nominations controversées à la tête des principales agences de sécurité.
La loyauté au détriment de la compétence
Trump semble privilégier la loyauté politique à l’expertise. Des noms comme Tulsi Gabbard pour la direction du renseignement national ou Kash Patel pour le FBI montrent une volonté claire : placer des personnes prêtes à suivre son agenda personnel plutôt que des experts capables de guider les agences dans un contexte mondial de plus en plus complexe. Cette approche risque de compromettre les capacités opérationnelles d’un système déjà confronté à des défis internes et
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L’érosion des ressources humaines
La stratégie de réduction de la bureaucratie fédérale, soutenue par Trump et ses alliés, menace directement le capital humain des agences de renseignement. Les réductions de personnel, notamment dans des secteurs critiques comme la technologie avancée et l’analyse des menaces mondiales, pourraient avoir des effets dévastateurs. De plus, le climat d’hostilité généré par la rhétorique présidentielle décourage les nouveaux talents d’entrer dans un domaine qui nécessite des années de formation et de spécialisation.
Un exemple historique illustre les risques : dans les années 1990, les réductions d’effectifs à la CIA après la chute de l’Union soviétique ont provoqué un manque de compétences qui a entravé la lutte contre le terrorisme dans les années suivantes. Aujourd’hui, la communauté du renseignement pourrait faire face à des problèmes similaires, aggravés par la difficulté de recruter de nouveaux agents dans un climat de méfiance croissante.
La politisation de l’information
L’un des plus grands dangers est la tendance de Trump à utiliser les informations des services de renseignement à des fins politiques. Pendant son premier mandat, il n’a pas hésité à divulguer des documents confidentiels ou à discréditer publiquement des rapports qui contredisaient son agenda. Cette dynamique pourrait entraîner une restriction du partage d’informations entre les agences, avec des conséquences désastreuses pour la sécurité nationale.
La politisation ne se limite pas aux échelons supérieurs. Les analystes pourraient se sentir sous pression pour se conformer aux attentes politiques, compromettant ainsi la qualité et l’indépendance des évaluations stratégiques. Ce risque s’est déjà manifesté en 2020, lorsque certains rapports sur l’ingérence chinoise dans les élections ont été manipulés pour des raisons politiques.
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Relations avec les alliés
La méfiance ne s’arrête pas aux frontières nationales. Pendant son premier mandat, Trump a remis en question les partenariats avec les alliés, révélant même des informations sensibles à des pays rivaux. Cette attitude risque de compromettre les relations de renseignement avec les partenaires internationaux, essentielles pour relever des défis mondiaux tels que le terrorisme ou la compétition avec la Chine et la Russie.
Un regard vers l’avenir
Malgré les difficultés, la communauté du renseignement a montré par le passé qu’elle savait résister aux pressions politiques. La clé pour surmonter cette nouvelle phase sera de maintenir le cap sur ses missions principales, en protégeant le pays contre les menaces internes et externes. Cependant, les décisions qui seront prises dans les années à venir pourraient laisser des cicatrices profondes, compromettant non seulement l’efficacité des agences, mais aussi leur réputation à l’échelle mondiale.
En fin de compte, le plus grand défi pour le renseignement américain sera de rester fidèle à sa mission, en évitant de se laisser entraîner dans les conflits politiques d’une administration qui semble préférer la confrontation à la coopération.
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Giuseppe Gagliano a fondé en 2011 le réseau international Cestudec (Centre d’études stratégiques Carlo de Cristoforis), basé à Côme (Italie), dans le but d’étudier, dans une perspective réaliste, les dynamiques conflictuelles des relations internationales. Ce réseau met l’accent sur la dimension de l’intelligence et de la géopolitique, en s’inspirant des réflexions de Christian Harbulot, fondateur et directeur de l’École de Guerre Économique (EGE)
Il collabore avec le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R) (Lien),https://cf2r.org/le-cf2r/gouvernance-du-cf2r/
avec l’Université de Calabre dans le cadre du Master en Intelligence, et avec l’Iassp de Milan (Lien).https://www.iassp.org/team_master/giuseppe-gagliano/
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