Par Giuseppe Gagliano, Président du Centro Studi Strategici Carlo De Cristoforis (Côme, Italie). Membre du comité des conseillers scientifiques internationaux du CF2R.
Au cours des cinq dernières années, la Chine a réalisé un bond qualitatif extraordinaire dans le secteur des puces mémoire, augmentant sa part de marché mondiale de zéro à 5 %, malgré les restrictions croissantes imposées par les États-Unis. Selon Nikkei Asia, les experts estiment que cette part pourrait même doubler d’ici 2025. Une grande partie de ces progrès est attribuée à ChangXin Memory Technologies (CXMT), leader dans la production de puces DRAM et engagé dans le développement de solutions avancées pour l’intelligence artificielle.
L’ascension de CXMT et le défi technologique
Basée à Hefei, dans la province d’Anhui, CXMT a adopté une stratégie d’expansion sans précédent, qui a culminé avec deux années d’investissements intensifs dans ses installations de production à Pékin et Hefei. L’entreprise s’est rapidement imposée comme un acteur clé, atteignant la capacité de produire des puces DRAM (Dynamic Random Access Memory) à échelle commerciale. Ces puces constituent un élément essentiel des appareils électroniques tels que les smartphones, les ordinateurs, les serveurs et les systèmes de réseau.
Mais CXMT ne s’est pas arrêtée là : elle a également lancé le développement de puces mémoire à large bande passante (HBM), essentielles pour gérer les charges de travail liées au traitement de l’intelligence artificielle. Ces puces sont conçues pour offrir des performances supérieures en termes de vitesse de transfert des données et de capacités de traitement, ce qui les rend idéales pour des applications allant de la formation des modèles d’intelligence artificielle à l’analyse avancée des données.
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Un contexte géopolitique tendu
L’expansion de CXMT s’inscrit dans un contexte géopolitique complexe, marqué par la compétition technologique entre les États-Unis et la Chine. Washington a imposé une série de restrictions sur l’exportation de technologies avancées vers Pékin, dans le but de limiter les progrès chinois dans les secteurs stratégiques. Cependant, la Chine a répondu par des investissements massifs dans son propre écosystème technologique, visant l’autosuffisance.
CXMT est l’un des exemples les plus frappants de cette stratégie. L’entreprise a adopté une approche pragmatique, combinant la recherche interne avec des collaborations ciblées pour surmonter les obstacles technologiques. Cette détermination lui a permis de défier les leaders mondiaux du secteur, tels que Samsung Electronics, SK Hynix et Micron Technology.
Un marché en pleine évolution
Le marché mondial des puces mémoire est l’un des plus compétitifs au monde, avec une valeur estimée à plus de 150 milliards de dollars en 2024. CXMT, bien qu’encore une entreprise émergente, comble rapidement le fossé technologique qui la sépare des géants du secteur. Sa capacité à produire des DRAM commercialement viables et son engagement dans les puces HBM la positionnent comme un potentiel facteur de transformation.
Si la part de marché de la Chine devait effectivement doubler au cours de l’année prochaine, comme le prédisent les experts, les dynamiques du secteur pourraient connaître une transformation radicale. La compétition ne portera plus seulement sur les performances technologiques, mais aussi sur la capacité à relever les défis géopolitiques et les chaînes d’approvisionnement mondiales.
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Conclusion
L’ascension de ChangXin Memory Technologies symbolise la détermination de la Chine à atteindre l’indépendance technologique et à défier la domination des entreprises occidentales et sud-coréennes. Dans une époque où le contrôle des technologies avancées constitue un élément clé de pouvoir géopolitique, les progrès de CXMT ne sont pas seulement une question économique, mais un signal du nouvel équilibre technologique mondial.
Le secteur des semi-conducteurs, autrefois considéré comme le domaine exclusif de quelques pays, pourrait bientôt assister à une redistribution des forces en présence, avec la Chine prête à s’imposer comme un acteur majeur.
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Giuseppe Gagliano a fondé en 2011 le réseau international Cestudec (Centre d’études stratégiques Carlo de Cristoforis), basé à Côme (Italie), dans le but d’étudier, dans une perspective réaliste, les dynamiques conflictuelles des relations internationales. Ce réseau met l’accent sur la dimension de l’intelligence et de la géopolitique, en s’inspirant des réflexions de Christian Harbulot, fondateur et directeur de l’École de Guerre Économique (EGE)
Il collabore avec le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R) (Lien),https://cf2r.org/le-cf2r/gouvernance-du-cf2r/
avec l’Université de Calabre dans le cadre du Master en Intelligence, et avec l’Iassp de Milan (Lien).https://www.iassp.org/team_master/giuseppe-gagliano/
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