
Par Olivier d’Auzon
Dans les méandres des montagnes du Cachemire, là où les cimes enneigées observent impassibles les passions humaines, un drame ancien reprend son cours avec une brutalité nouvelle. Le 22 avril 2025, une attaque sanglante à Pahalgam, haut lieu touristique de la vallée du Cachemire indien, a fauché la vie de 26 innocents — 25 Indiens et un ressortissant népalais.
Très vite, New Delhi a désigné les coupables : des terroristes liés au tristement célèbre Lashkar-e-Taiba, organisation islamiste armée que l’Inde accuse Islamabad de protéger. Comme toujours, le Pakistan a nié, évoquant une “opération sous faux drapeau”, insinuant que l’Inde pourrait avoir elle-même orchestré l’attentat pour justifier une riposte.
Une riposte, il y en eut une. L’opération Sindoor, menée par les forces indiennes, a frappé neuf positions supposées terroristes, certaines situées sur le territoire pakistanais. Depuis, la ligne de contrôle, qui coupe le Cachemire en deux depuis 1949, n’est plus qu’un long crépitement de balles et d’obus. Les frontières terrestres et aériennes ont été fermées. Le traité des eaux de l’Indus, pourtant pilier de la stabilité bilatérale depuis 1960, est suspendu. Le commerce est interrompu. En quelques jours, les deux puissances nucléaires du sous-continent sont repassées du dialogue prudent à l’affrontement larvé.
Un passé qui ne passe pas
Ce n’est pas la première fois que les peuples indien et pakistanais se retrouvent ainsi au bord du gouffre. Depuis la partition sanglante de 1947, le Cachemire est une plaie béante au cœur de leurs relations. Le choix du maharaja hindou du Cachemire de rejoindre l’Union indienne, contre l’avis d’une population majoritairement musulmane, a enclenché une spirale de guerres, d’insurrections et d’amertume.
L’Inde, démocratie laïque et multiconfessionnelle dans ses principes, voit dans la rébellion cachemirie une menace intérieure nourrie de l’extérieur. Le Pakistan, fondé sur une idéologie de protection des musulmans du sous-continent, considère le Cachemire comme une terre inachevée de sa partition. Cette asymétrie de perception rend tout dialogue profondément bancal.
Méfiance, double-front et diplomatie paralysée
La situation géopolitique actuelle est d’autant plus périlleuse que New Delhi, depuis les escarmouches meurtrières avec la Chine en 2020 dans le Ladakh, se retrouve dans un inconfortable « double front ». D’un côté, l’armée chinoise guette sur les hauteurs himalayennes. De l’autre, les infiltrations terroristes présumées en provenance du Pakistan ne cessent de nourrir la paranoïa sécuritaire indienne. Pour Delhi, tout relâchement au Cachemire pourrait signifier une brèche stratégique.
Certes, en 2024, une lueur diplomatique avait brillé entre les deux voisins. Mais les nationalismes, alimentés par les réseaux sociaux et les chaînes de télévision en continu, n’ont laissé que peu de place aux artisans de la paix. La classe politique des deux côtés préfère, pour des raisons internes, l’escalade rhétorique à la compromission diplomatique.
À lire aussi : Le Pakistan à la croisée des chemins : La montée du terrorisme et de l’instabilité
Et maintenant ?
Le scénario d’une guerre totale semble encore évitable, mais la pente est glissante. Une salve mal calculée, une bavure, une surenchère médiatique : et le déclenchement pourrait être immédiat. L’Inde, forte de sa supériorité militaire conventionnelle, pourrait être tentée de frapper encore. Le Pakistan, détenteur de l’arme nucléaire et riche d’alliances régionales, ne resterait pas inerte. Ce serait l’effondrement d’un équilibre déjà précaire.
Dans les chancelleries occidentales, l’inquiétude grandit. Les États-Unis, la Chine, la France ou le Royaume-Uni appellent à la retenue. Mais leur voix porte-t-elle encore dans un sous-continent qui affirme de plus en plus sa souveraineté stratégique ?
Il est pourtant urgent d’ouvrir une voie de désescalade. Il faut restaurer les lignes de communication militaires sur la ligne de contrôle, relancer des négociations discrètes — peut-être via des médiateurs tiers comme la Norvège ou les Émirats — et, surtout, reconnaître que la paix durable ne se construira ni par la force ni par l’humiliation de l’adversaire. Elle suppose un courage politique de part et d’autre : celui de regarder au-delà des passions identitaires, pour penser en termes de stabilité régionale, de prospérité commune, et de destin civilisationnel partagé.
Un réalisme nécessaire
Soyons lucides : à court terme, la normalisation est improbable. La réconciliation indo-pakistanaise ne viendra ni des sommets militaires ni des tribunes électorales. Elle émergera lentement, si les sociétés civiles, les élites économiques, les intellectuels osent faire entendre une autre voix : celle d’un avenir sans guerre, dans une Asie du Sud enfin émancipée de ses fantômes.
À lire aussi : ANALYSE – Relations France-Pakistan dans le secteur de la défense : Une nouvelle entente ?
#Cachemire, #IndePakistan, #TensionsIndoPakistanaises, #LigneDeContrôle, #KashmirConflict, #SouthAsiaCrisis, #TerrorismeCachemire, #LashkareTaiba, #GuerreIndoPakistanaise, #IslamabadNewDelhi, #IndusTreaty, #PahalgamAttack, #SindoorOperation, #SécuritéRégionale, #FrontièreHimalaya, #EscaladeNucléaire, #RisqueDeGuerre, #GéopolitiqueAsie, #PakistanIndiaConflict, #DiplomatieDeCrisis, #SoutienOccidental, #Partition1947, #ConflitCachemirien, #InstabilitéSudAsiatique, #DissuasionNucléaire, #ViolencesReligieuses, #IslamPolitique, #IndeLaïque, #PakistanMusulman, #DialogueDePaix, #MédiationInternationale, #GéopolitiqueNucleaire, #CriseIndoPakistanaise2025, #FlashpointAsia, #CriseCachemirienne, #ConflitOublié, #AsiaUnderTension, #PaixImpossible, #DangerNucléaire, #AsieEnFeu


