DÉCRYPTAGE – Les pays arabes face au drame palestinien : Responsabilités, renoncements et perspectives

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Un Palestinien pleure sur les ruines de sa maison à Gaza tandis que les dirigeants arabes, divisés et hésitants, peinent à proposer une solution collective 
Un Palestinien pleure sur les ruines de sa maison à Gaza tandis que les dirigeants arabes, divisés et hésitants, peinent à proposer une solution collective 

Par Hedi Dardour

Le conflit israélo-palestinien demeure l’un des plus longs et des plus complexes de l’histoire contemporaine. Pourtant, au début des années 1990, une issue semblait possible. Les accords d’Oslo, signés en 1993 entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat, avaient ouvert une perspective historique : la reconnaissance mutuelle des deux peuples et la construction progressive de deux États. La disparition tragique de ces deux leaders a mis fin à cette dynamique. Depuis, les espoirs de paix se sont effondrés. Une large part de responsabilité incombe aux pays arabes qui, au lieu d’accompagner cet accord fondateur, ont laissé le champ libre aux forces les plus radicales.

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1. Oslo : une opportunité manquée

Les accords d’Oslo, signés en 1993, furent accueillis avec un mélange de scepticisme et d’hostilité dans la plupart des capitales arabes. Craignant des concessions excessives et se méfiant d’Israël, des pays comme la Syrie, l’Irak et la Libye rejetèrent ouvertement ces accords, tandis que d’autres, comme l’Arabie Saoudite et l’Égypte, adoptèrent une attitude prudente, sans les soutenir activement. Seuls quelques dirigeants, à l’image du roi Hassan II[i] du Maroc, adoptèrent une position plus ouverte, encourageant une approche pragmatique. Cette frilosité collective affaiblit l’Autorité palestinienne naissante et, en Israël, renforça le camp du Likoud et les partisans d’une ligne intransigeante. Peu à peu, le processus d’Oslo se vida de sa substance, laissant place à une spirale de méfiance et de violence qui perdure encore aujourd’hui.

La poignée de main historique entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat, en présence de Bill Clinton, le 13 septembre 1993. REUTERS/GARY HERSHORN
La poignée de main historique entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat, en présence de Bill Clinton, le 13 septembre 1993. REUTERS/GARY HERSHORN

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2. L’émergence des fractures palestiniennes

Ce vide politique a favorisé la montée en puissance du Hamas. Soutenu financièrement par le Qatar et idéologiquement par les Frères musulmans, le mouvement a progressivement pris le contrôle de Gaza, accentuant la fracture avec le Fatah, qui demeure le pouvoir légitime en Cisjordanie. Cette division interne a considérablement affaibli la cause palestinienne sur la scène internationale. Dans le même temps, l’Iran et son allié libanais, le Hezbollah, ont investi le champ militaire et politique, cherchant à utiliser le conflit comme levier dans leur affrontement régional contre Israël et, indirectement, contre l’Arabie saoudite et ses alliés.

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3. Une guerre qui dépasse la seule question palestinienne

L’attaque du 7 octobre 2023, menée par le Hamas contre Israël, marque une rupture tragique. L’horreur de l’attaque, les prises d’otages et les violences commises ont choqué le monde. La riposte israélienne, massive et continue, s’est traduite par des milliers de victimes civiles à Gaza, faisant craindre un véritable risque de destruction massive du peuple palestinien. Mais au-delà de ce cycle dramatique, le conflit reflète une lutte de leadership entre puissances régionales : d’un côté, l’Iran et ses alliés chiites ; de l’autre, l’Arabie saoudite et le monde sunnite. Gaza est devenue l’un des théâtres de cette rivalité stratégique et religieuse.

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4. Quelles perspectives pour une paix durable ?

Si la communauté internationale joue un rôle essentiel, la clé réside avant tout dans une prise de responsabilité arabe. Tant que les pays de la région ne s’impliqueront pas activement, aucune solution pérenne n’émergera. Trois conditions apparaissent incontournables :

  • Désarmer le Hamas et mettre fin à sa capacité de nuisance militaire.
  • Libérer les otages détenus en violation du droit international.
  • Administrer provisoirement Gaza sous mandat onusien, avec un appui arabe concret, en attendant de reconstruire une autorité palestinienne unifiée et légitime.

Une telle démarche priverait le gouvernement israélien de Benjamin Netanyahou d’un argument majeur pour prolonger l’impasse et l’isolerait davantage sur la scène démocratique internationale.

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Les peuples palestinien et israélien sont aujourd’hui pris en otage par les extrêmes, chacun alimentant la survie de l’autre. L’absence d’une stratégie arabe cohérente a contribué à cet enlisement. Le moment est venu pour les pays arabes d’assumer leurs responsabilités, non pas seulement par des déclarations de solidarité, mais par des actes concrets permettant de reconstruire un horizon politique. Sans cela, le conflit ne pourra que se perpétuer, au prix de nouvelles tragédies humaines et d’une instabilité régionale croissante.

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[i] Michael M. Laskier, Israel and the Maghreb, From Statehood to Oslo


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