Par Olivier d’Auzon
La Turquie a joué un rôle clé dans la médiation d’un accord entre l’Éthiopie et la Somalie, accordant à la première un accès à la mer Rouge et à l’océan Indien. Cet accord met fin à une querelle d’un an qui menaçait de dégénérer en conflit régional.
Pour autant, cette nouvelle entente annule un précédent accord entre l’Éthiopie et la région sécessionniste du Somaliland, de janvier 2024 qui aurait permis à l’Éthiopie d’établir une base navale dans le Somaliland en échange d’une reconnaissance de son indépendance.
Le nouvel accord turc, appelé la « Déclaration d’Ankara », offre à l’Éthiopie un accès alternatif à la mer Rouge sans compromettre la souveraineté de la Somalie en légitimant le Somaliland
Le nouvel accord turc, appelé la « Déclaration d’Ankara », offre à l’Éthiopie un accès alternatif à la mer Rouge sans compromettre la souveraineté de la Somalie en légitimant le Somaliland. Qu’en est-il du Somaliland ?
Depuis sa déclaration d’indépendance de la Somalie en 1991, le Somaliland est resté dans une situation de flou diplomatique.
Cette incertitude s’est du reste, accentuée avec le conflit Israël-Gaza, auquel les rebelles houthis du Yémen ont lié leur propre agenda en exploitant la région de la mer Rouge. Le Somaliland avait également proposé un accord à l’Éthiopie : un accès à la mer Rouge en échange de la reconnaissance de son indépendance.
Cette offre reste sur la table, mais est-elle encore pertinente ? En janvier 2024, le Somaliland et l’Éthiopie avaient signé un protocole d’entente (PE) en ce sens.
Toutefois, la Somalie avait vivement contesté cet accord, le considérant comme une atteinte à sa souveraineté. En avril 2024, la Somalie a expulsé l’ambassadeur éthiopien et les forces de maintien de la paix éthiopiennes de l’Union africaine.
C’est alors que la Turquie est intervenue pour négocier un accord permettant à l’Éthiopie d’accéder à la mer Rouge tout en préservant la souveraineté de la Somalie.
Le nouvel accord invalide donc l’accord de janvier 2024 entre l’Éthiopie et le Somaliland, bien que ce dernier affirme que l’offre initiale reste valable et espère toujours être prise en compte dans de futures négociations régionales. Toutefois, l’impact de la Déclaration d’Ankara risque de marginaliser davantage le Somaliland sur la scène diplomatique.
Le dilemme du Somaliland
Le Somaliland, reconnu par peu de nations et sans siège à l’ONU, a toujours cherché des moyens de renforcer sa position internationale. En proposant un accès stratégique à la mer Rouge à l’Éthiopie, il espérait obtenir une reconnaissance officielle en tant qu’État indépendant. Mais l’intervention de la Turquie et le nouvel accord mettent en évidence une difficulté persistante : les grandes puissances régionales privilégient souvent les solutions qui préservent l’intégrité territoriale des nations établies, comme la Somalie.
Conséquences régionales
L’accord turc a de profondes implications pour la Corne de l’Afrique.
- Pour l’Éthiopie : Cet accès à la mer Rouge renforce sa position géostratégique et réduit sa dépendance aux ports de Djibouti, une priorité pour ce pays enclavé.
- Pour la Somalie : La souveraineté est réaffirmée, mais la question du Somaliland demeure un sujet sensible pouvant générer des tensions internes.
- Pour le Somaliland : Cet échec pourrait pousser ses dirigeants à intensifier leurs efforts pour établir des alliances bilatérales avec d’autres nations ou à revoir leur stratégie diplomatique.
- Pour la Turquie : Ce succès diplomatique consolide son rôle d’acteur clé dans la région, tout en renforçant ses relations économiques et stratégiques avec les deux pays.
Les prochaines étapes
La mise en œuvre de cet accord dépendra de plusieurs facteurs :
- Assurer la sécurité régionale : Les tensions autour des routes maritimes de la mer Rouge et les actions des rebelles houthis au Yémen doivent être gérées pour garantir un accès sûr.
- Clarifier le rôle du Somaliland : Bien que le nouvel accord soit clair sur l’annulation du précédent avec le Somaliland, il reste à voir comment cette région réagira, notamment si elle sollicite le soutien d’acteurs internationaux.
- Développement des infrastructures : L’Éthiopie devra investir massivement dans les corridors logistiques et infrastructures portuaires pour tirer parti de cet accès stratégique.
Ce nouvel accord redéfinit la géopolitique de la Corne de l’Afrique et met en lumière le rôle croissant de la Turquie en tant que médiateur dans les conflits régionaux. Toutefois, la situation reste fluide, avec le potentiel d’autres interventions ou ajustements diplomatiques dans les mois à venir.
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