
Par Giuseppe Gagliano, Président du Centro Studi Strategici Carlo De Cristoforis (Côme, Italie).
Dans son intervention en Europe, J.D. Vance a clairement exposé la position de l’administration Trump : les États-Unis n’ont pas l’intention de se soumettre ou de s’adapter au prétendu « soft power réglementaire » européen. Sous la présidence Trump, Washington serait prêt à désamorcer ce qui est perçu comme un excès de règles et de contraintes, considéré comme pénalisant pour l’innovation et la croissance économique.
Sont particulièrement visées :
L’Union européenne et le poids de ses normes : du RGPD au Digital Service Act.
L’UE, à travers des propositions de loi et des lignes directrices, cherche à établir des limites éthiques, de transparence et de protection des données personnelles. Selon Vance, cette approche risque de ralentir la recherche et les applications commerciales de l’IA, freinant ainsi le progrès technologique. Le Digital Service Act, conçu pour limiter l’abus de pouvoir des Big Tech et garantir une responsabilité accrue des plateformes, est interprété par l’administration Trump comme une tentative d’affaiblir la suprématie technologique des États-Unis, en imposant des charges et des coûts d’adaptation considérables aux entreprises américaines.
L’accusation de Vance : trop de « légalisme » et des compromis qui freinent l’innovation.
Vance critique ce qu’il qualifie de « légalisme » excessif et la forte « culture de l’accord » au sein des institutions européennes, qui, selon Trump et son vice-président, rendent l’Union faible ou trop encline au compromis dans des scénarios géopolitiques, au détriment des intérêts américains. Selon Vance, les États-Unis doivent donc défendre leurs propres intérêts, ne pas accepter passivement les réglementations pensées à Bruxelles et promouvoir un modèle plus agile et compétitif. C’est le noyau de la doctrine « America First » : défendre l’industrie américaine, sa capacité d’innover et de s’étendre sur les marchés mondiaux, sans rester « entravée » par les contraintes européennes.
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L’asymétrie numérique entre les États-Unis et l’Europe : D’où vient la nécessité de réglementer ?
Il est difficile de ne pas souligner que les tensions entre les États-Unis et l’Europe ne sont pas récentes, mais qu’elles se sont renouvelées de manière plus explicite avec l’« America First ». L’Europe a pris conscience tardivement de l’importance de la souveraineté numérique et cherche à y remédier en introduisant des règles et des normes visant à protéger les consommateurs et les entreprises européennes contre les excès des Big Tech. Vance ignore (ou sous-estime) que l’asymétrie entre les géants de la Silicon Valley et le tissu industriel européen, moins compétitif dans le domaine numérique, est souvent à l’origine de cet effort réglementaire : l’UE n’a pas l’intention de « bloquer » l’innovation, mais d’éviter qu’elle ne s’impose selon des modalités ne respectant pas les principes de protection des données, de concurrence loyale et de gouvernance transparente.
IA et questions éthiques : Pourquoi l’innovation ne peut ignorer les risques
Au contraire, il est nécessaire de réfléchir au fait que l’innovation technologique – surtout dans des domaines sensibles comme l’Intelligence Artificielle – n’est pas une valeur neutre, mais doit se confronter à des questions éthiques, sociales et de sécurité. De ce point de vue, la critique de Vance à l’égard de la surrèglementation européenne apparaît réductrice : on ne peut viser l’innovation en ignorant les dommages collatéraux qu’une utilisation non réglementée de l’IA pourrait entraîner, par exemple en matière de manipulation des données, de désinformation, de surveillance massive ou de discriminations algorithmiques.
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Le nouvel unilatéralisme américain : Conséquences sur les relations transatlantiques
Sur le plan géopolitique, la doctrine « America First » tend à rejeter les enceintes multilatérales habituelles où l’UE et les États-Unis pourraient (et devraient) concilier leurs intérêts divergents. L’idée de Vance de « démanteler » le potentiel réglementaire européen laisse entrevoir une volonté d’imposer son propre agenda, plutôt que de rechercher un compromis.
Cela accentue la fracture transatlantique non seulement en matière de règles numériques, mais aussi dans des domaines tels que la sécurité, la défense et les relations avec des puissances comme la Chine et la Russie. Ce « nouvel unilatéralisme » américain finira par nuire non seulement aux relations avec l’Europe, mais aussi à la crédibilité même des États-Unis en tant que partenaire fiable.
Vers un équilibre entre innovation et protection des droits
Enfin, la position de Vance ne prévoit pas de solutions de médiation : soit on accepte la dérégulation américaine, soit on reste « hors » du cercle de la future croissance numérique dominée par l’IA. Pourtant, il est crucial de trouver un équilibre entre la « défense de l’innovation » et la « protection des droits » (des citoyens, des consommateurs, des utilisateurs) : sans cela, on risque de favoriser les inégalités mondiales, de nourrir des nationalismes technologiques et de laisser aux seules logiques du marché des questions qui touchent profondément la vie des personnes.
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D’une stratégie « America First » à un dialogue (im)possible ?
Le discours de J.D. Vance – en tant que vice-président de l’administration Trump – reflète l’intention d’affirmer la primauté des intérêts américains sur un marché de plus en plus influencé par la réglementation européenne. Dans le domaine numérique, l’« America First » se traduit par la volonté de contenir le modèle de l’UE, perçu comme excessivement contraignant et potentiellement nuisible au dynamisme de l’industrie américaine. D’un côté, il est vrai que l’Europe adopte souvent des réglementations rigides qui peuvent affecter la liberté des entreprises. De l’autre, ces contraintes répondent à une demande de protection et de souveraineté numérique qui, à l’ère d’une forte concentration technologique, ne saurait être ignorée. Le risque, dans le discours de Vance, est de rétablir un unilatéralisme qui nuit à la recherche de solutions communes : une stratégie qui, à long terme, pourrait affaiblir aussi bien les positions de l’UE que le leadership même des États-Unis, si ces derniers restent sourds aux besoins d’une réglementation partagée et à la nécessité de trouver un équilibre entre innovation et droits fondamentaux.
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