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TRIBUNE – 2027 : Le tribun de la plèbe 

Cyril Hanouna dans le costume de De Gaulle
Réalisation Le Lab Le Diplo

Par Julien Aubert

Il y un peu moins de dix ans, alors que je prononçais un discours de mariage, j’imaginais recevoir une lettre du futur, et j’avais avancé l’idée que Cyril Hanouna avait été élu Président de la République à deux reprises avant 2045. Rires de l’assistance garantis… 

La réalité a depuis rattrapé la fiction. En 2025, un hebdomadaire a publié en Une, une photo de l’animateur télé avec neuf pages consacrées à sa possible candidature à l’Elysée.  L’IPSOS a réalisé un sondage le créditant de 10 points d’intention de vote, 78% des Français refusant cependant d’envisager sérieusement cette option. 

Le supposé candidat devrait éclaircir ses intentions mais certaines de ses idées décapantes circulent déjà. La classe politique regardera de haut Hanouna. Elle aurait tort.

La France n’est pas une île et Hanouna ne serait pas le seul à tenter la prise de pouvoir avec quelques idées simplistes et des pratiques de saltimbanque. On citera Zelensky ou Pepe Grillo, mais Trump ou Milei ne sont pas loin. Coluche en son temps s’était lancé dans une aventure similaire, avant d’être remis en place par le système. Il disait avec justesse :        « J’arrêterais de faire de la politique quand les politiciens arrêteront de nous faire rire ! Â»

Or, les propositions stupides, farfelues ou démagogiques de la classe politique française ne manquent pas. Ouvrons donc le programme du candidat Hanouna pour l’analyser sérieusement. 

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Pour commencer, il y a des choses qui relèvent à priori plus du saltimbanque que de la monarchie présidentielle rêvée par de Gaulle. Hanouna s’imagine ainsi animant des grands débats démocratiques. Dans le même registre, Hanouna propose de payer soi-même un terrain de padel qu’il installerait à l’Élysée. 

Cela peut sembler un rôle plus proche du GO du Club Med que du roi de France, mais en réalité, au-delà des apparences, Hanouna s’inscrit dans une forme de continuité. Celui d’animateur n’est ainsi pas si éloigné du rôle de Macron pendant la crise des Gilets Jaunes et on peut penser que « Baba Â» qui avait été le premier à ouvrir son plateau TV aux Gilets Jaunes a été marquée par cette expérience. Quant au padel, laissons de côté l’aspect anecdotique et fantasque de l’équipement pour rappeler que De Gaulle avait fait la même chose en aménageant une chapelle destinée à son usage privé. Les temps et les priorités ont changé – l’un priait, l’autre joue – et le côté grand enfant peut choquer, mais la philosophie est identique. 

Du reste – et c’est ça l’essentiel – Hanouna propose de payer ça sur ses fonds propres (comme le Général avec sa chapelle) car il a compris que les Français ont une obsession sur l’argent du politique. Il explique aussi qu’il renoncerait à ses émoluments présidentiels. 

Hanouna a ensuite un programme économique pour augmenter le pouvoir d’achat. Il est à mon sens totalement inapplicable mais on aurait tort de se gausser car il ne fait que répondre à une anxiété profonde des Français sur leur niveau de vie et le déclassement, là où la classe politique fait mine de proposer des demi-solutions. 

C’est ainsi qu’il juxtapose une politique de la demande, très marquée à gauche, en augmentant massivement le SMIC (via la suppression des charges) et en supprimant la TVA sur les produits de première nécessité, et une politique de l’offre, marquée à droite, en baissant massivement les charges des entreprises. 

La faiblesse de ce double traitement de choc est que le système de protection sociale, financé par les charges patronales et salariales, se trouverait illico en faillite. 

Néanmoins, Hanouna complète cette drôle de politique d’une suppression des droits de sécurité sociale pour les gens gagnant plus de 2 500 euros, et agit donc aussi sur la dépense sociale. De facto, le système serait réservé aux « plus pauvres Â», avec un problème de transfert de la charge sociale, qui reviendrait à l’impôt. La protection sociale ne concernerait en effet pas beaucoup de travailleurs dans une France où le SMIC serait porté à 2300 euros (les salariés gagnant entre 2 300 et 2 500…) mais plutôt les Français émargeant aux minimas sociaux. 

Le point positif est qu’il y aurait une vraie « marche Â» entre les revenus tirés du travail et ceux des non-travailleurs. Le point négatif est que, déliés de la solidarité nationale, les Français les mieux rémunérés pourraient se soigner dans le privé et cela ne favoriserait certainement pas la solidarité nationale. 

Hanouna reflète donc la contradiction profonde d’une époque qui veut plus de service et de solidarité, mais moins de charges. Son modèle aboutirait à une France coupée en deux. Accessoirement, il n’est pas certain en économie ouverte que cela permettrait de redresser la croissance. Les entreprises feraient probablement un calcul favorable à la robotisation plutôt qu’au travail, au vu des salaires suisses. Il y aurait probablement un choc fiscal, puisque la TVA serait en partie supprimée, mais une TVA sur les salaires la remplacerait, ce qui de facto viendrait frapper les gens qui travaillent plutôt que les gens qui consomment (en exemptant les touristes étrangers par exemple). 

Au plan régalien, Hanouna tente également de répondre à la demande sociale pour l’ordre avec un « Guantanamo à la Française », idée très percutante mais floue car le principe de Guantanamo n’était pas tant le fait qu’il s’agissait d’une prison isolée (comme Alcatraz) mais qu’elle se trouvait à Cuba, avec une inapplication honteuse du droit international (notamment le recours à la torture). Une prison pour 100 prisonniers très dangereux ne changera pas le problème de la surpopulation carcérale. Je ne pense pas qu’Hanouna projette d’effacer les droits de l’Homme dans nos espaces carcéraux donc son idée est du même ordre que la proposition choc de Gérald Darmanin. 

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Enfin, Hanouna veut changer de République en alignant des propositions plébiscitées par les Gilets Jaunes mais dont les implications politiques sont sous estimées. En réduisant le nombre de députés à 380 pour 70 millions d’habitants, Hanouna doublerait presque la taille des circonscriptions, éloignant la représentation politique du peuple qu’on prétend mieux représenter. Ce serait la fin de la représentation politique des territoires ruraux. La diminution de leurs indemnités fera fuir les diplômés, et consoliderait donc deux profils : ceux qui ne peuvent pas gagner plus ailleurs et ceux qui de toutes façons sont richissimes. Pas sûr que la classe moyenne s’y retrouve. Encore une fois, on retrouve une France coupée en deux. 

Je crains que la consultation référendaire -qui en soi une excellente idée – ne soit mal pensée.  Mensuelle et donc systématique, elle finira par lasser les Français avec des taux de participation décroissants. En proposant la révocation d’élus appauvris par référendum, on sera de toutes façons certains que cette noble vocation se prolétarisera ou trouvera par d’autres moyens – la corruption en est un – de survivre. 

Bien que ces propositions soient dangereuses, mal pensées et mal coordonnées, elles sont cependant essentielles car elles sont la captation de l’esprit d’un pays qui veut plus d’ordre, plus de social mais moins d’impôts. Un pays qui est divisé mais voudrait récupérer sa souveraineté. Un pays contradictoire. 

La France de 2027 ressemblera à celle de 1981. Comme en 1981, la France hésite à choisir le parti de l’opposition éternelle – hier les socialistes alliés aux communistes, aujourd’hui le RN – et à sauter dans le vide. Seul bémol : en 1981, Mitterrand n’était pas empêché par la Justice. A l’inverse, en 2027, Marine Le Pen est la seule à pouvoir jouer partiellement le rôle de candidate antisystème au sein d’un RN qui s’est institutionnalisé. Si elle devait être abattue par un missile judiciaire, il y aurait une place pour « un tribun de la Plèbe Â». En 2022, le rôle du perturbateur du système avait été capté par Zemmour (mais celui-ci avait choisi la question identitaire, ce qui en faisait le porte-voix de la bourgeoisie). En 2027, un candidat à la Pepe Grillo proposant un programme iconoclaste pourrait bousculer le scrutin. 

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