ANALYSE – Mer Rouge : Comment les Houthis ont transformé l’extorsion maritime en une industrie à 2 milliards de dollars

Shares
Pirates Africains
Réalisation Le Lab Le Diplo

Par Olivier d’Auzon

Grâce à une stratégie mêlant technologie, menace militaire et diplomatie parallèle, les Houthis du Yémen ont érigé l’extorsion des navires en un modèle économique structuré, perturbant profondément le commerce mondial, révèle l’hebdomadaire britannique The Economist (inside-the-houthis-moneymaking-machine, publié le 18 janvier 2025)

Un nouveau visage de la piraterie en mer Rouge

Longtemps considérée comme une route commerciale vitale reliant l’Asie à l’Europe via le canal de Suez, la mer Rouge est aujourd’hui le théâtre d’une crise sans précédent. Depuis novembre 2023, les Houthis, mouvement armé chiite soutenu par l’Iran, ont multiplié les attaques contre les navires marchands traversant cette zone stratégique.

Mais au-delà des opérations militaires, un phénomène plus insidieux s’est mis en place : les Houthis ont industrialisé l’extorsion maritime, mettant en place un canal de communication dédié aux négociations avec les armateurs. Une simple adresse e-mail, à la manière d’un service client, permet aux compagnies maritimes d’acheter leur passage en toute sécurité.

Derrière cette approche bureaucratique se cache une mécanique financière implacable. The Economist estime que les Houthis récoltent jusqu’à 2 milliards de dollars par an grâce à ces paiements, un chiffre qui illustre l’ampleur du problème.

À lire aussi : La pêche illégale et le trafic de drogue : nouveaux fléaux du

Des choix limités pour les armateurs

Pour les compagnies maritimes, les alternatives sont peu engageantes :

  • Payer la rançon et obtenir la garantie d’un passage sans encombre.
  • Refuser et risquer une attaque par drones ou missiles, avec un coût humain et matériel potentiellement considérable.
  • Contourner l’Afrique en passant par le cap de Bonne-Espérance, un détour qui allonge les délais de transport et fait exploser les coûts.

Les armateurs occidentaux sont majoritairement réfractaires à ces paiements, préférant le détour africain malgré ses inconvénients. En revanche, d’autres pays, dont la Chine, auraient choisi une approche plus pragmatique, acceptant de verser des sommes aux Houthis pour sécuriser leurs traversées.

À lire aussi : ANALYSE – La guerre de l’information autour des

Un impact colossal sur le commerce mondial

Les conséquences économiques de cette extorsion maritime sont déjà palpables :

  • Baisse du trafic en mer Rouge : jusqu’à -70 % selon certaines estimations.
  • Explosion du trafic via le cap de Bonne-Espérance : le nombre de navires empruntant cette route a doublé depuis le début de la crise.
  •  Surcoût pour le commerce mondial : les détours, délais et hausses du prix du carburant génèrent des coûts supplémentaires estimés à 175 milliards de dollars par an, inévitablement répercutés sur les consommateurs.

En paralysant un axe maritime qui gère environ 30 % du trafic mondial de conteneurs, les Houthis ont introduit une nouvelle variable d’incertitude pour les marchés mondiaux, aggravant un contexte économique déjà marqué par les répercussions de la pandémie, la guerre en Ukraine et le ralentissement économique global.

À lire aussi : Le Sénégal se tourne vers la sûreté maritime pour protéger son nouveau statut de

Une stratégie durable et dangereuse

Le plus inquiétant dans cette situation est la viabilité du modèle. Contrairement aux actes de piraterie traditionnels, souvent sporadiques et peu organisés, le système mis en place par les Houthis repose sur une structure sophistiquée combinant menace militaire et diplomatie souterraine.

Ce modèle d’extorsion permet non seulement de financer leurs opérations militaires, mais aussi d’accroître leur influence dans la région. Pire, il pourrait inspirer d’autres groupes militants à travers le monde. Si la communauté internationale ne parvient pas à enrayer ce phénomène, ce type de racket maritime pourrait devenir une menace récurrente, voire s’étendre à d’autres secteurs comme l’aviation.

L’absence de réponse coordonnée face à cette crise illustre les limites de la gouvernance maritime mondiale. En l’état actuel, chaque acteur agit selon ses propres intérêts, laissant le champ libre à une milice qui a su transformer une menace en un véritable empire financier.

À lire aussi : La création des Houthis : le retour en force de la


#Houthis, #Yémen, #ExtorsionMaritime, #PiraterieModerne, #MerRouge, #CommerceMondial, #MenaceMilitaire, #DiplomatieParallèle, #Technologie, #StratégieMilitaire, #RacketMaritime, #SécuritéMaritime, #Géopolitique, #TheEconomist, #Hégémonie, #CriseÉconomique, #TransportMaritime, #Navigation, #ConflitInternational, #ImpactÉconomique, #RouteCommerciale, #Piraterie, #Extorsion, #InnovationMilitaire, #ConflitGlobal, #SûretéDesMers, #StratégieÉconomique, #InfluenceMilitaire, #ConflitGéopolitique, #DétournementDeNavires, #Investissements, #RisqueGlobal, #CommerceInternational, #RoutageMaritime, #TensionsRégionales, #SécuritéInternationale, #OpérationsMilitaires, #PouvoirArme, #DéfiMondial, #TheEconomist

Shares
Retour en haut