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ANALYSE – Afrique : La France au pied du mur

drapeau français en lambeaux et en fond un paysage crépusculaire en Afrique
Réalisation Le Lab Le Diplo

Par Olivier d’Auzon

À Kigali, à Yaoundé, à Dakar ou à N’Djamena, l’été 2025 ne sera pas un été comme les autres pour la diplomatie française. Dans un climat de désaffection croissante entre Paris et une partie de l’Afrique francophone, Emmanuel Macron a validé une série de nominations à la tête d’une dizaine d’ambassades. Un geste fort ? Plutôt un sursaut stratégique, dans une partie diplomatique dont la France ne maîtrise plus les règles.

Un désengagement militaire devenu inévitable

Le retrait progressif des forces françaises du Sahel – du Mali, du Burkina Faso, du Niger, de la Centrafrique – a signé la fin d’une époque. Celle où la France, puissance tutélaire postcoloniale, garantissait par les armes la stabilité des régimes amis. Ce temps est révolu. Non seulement les populations locales rejettent de plus en plus ouvertement la présence française, mais les dirigeants eux-mêmes, portés par un vent souverainiste, ont compris que leur légitimité ne pouvait plus se construire à l’ombre du tricolore.

Désormais, deux seules bases militaires subsisteraient : à Libreville et à Djibouti. Vestiges d’une époque où la France tenait encore son rang en Afrique comme ailleurs. Ce recentrage militaire s’impose, mais il pose une question plus large : la France peut-elle encore être une puissance africaine si elle n’en est plus le bras armé ?

L’ingratitude n’est pas une stratégie

Lors de la conférence annuelle des ambassadeurs, le président de la République a rappelé les efforts de la France, son rôle décisif dans la lutte contre le terrorisme, et a regretté, avec des mots pesés mais clairs, le manque de reconnaissance de certaines capitales africaines. Ce reproche, s’il peut sembler légitime du point de vue français, résonne mal sur le continent. Car les peuples africains ne jugent pas les intentions, mais les résultats. Et le ressentiment populaire, nourri par les échecs collectifs dans le Sahel, ne se dissipe pas à coup de chiffres sur l’aide publique au développement.

Il ne suffit plus de défendre un bilan. Encore faut-il incarner une vision. Et celle-ci fait aujourd’hui défaut.

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Un continent désormais pluriel

L’Afrique n’est plus le pré-carré de quiconque. La Chine y investit massivement, la Russie y envoie ses mercenaires, la Turquie y construit des mosquées et des routes, les Émirats y achètent ports et influence, et les États-Unis y reviennent, prudemment, avec le langage du partenariat. Dans ce concert polyphonique, la France peine à trouver sa note juste.

L’ancienne logique – basée sur la fidélité, les accords secrets et une aide conditionnelle – ne fonctionne plus. L’Afrique contemporaine est une Afrique stratégique, exigeante, connectée. Elle veut des partenariats d’égal à égal, non des rappels à l’ordre hérités de la Françafrique.

Repenser la diplomatie africaine

Le remaniement annoncé de la direction Afrique du Quai d’Orsay traduit cette prise de conscience. Il faut repenser en profondeur l’action diplomatique, non pas pour abandonner l’Afrique, mais pour la réaborder avec humilité et clarté. Cela suppose de redéployer nos réseaux culturels, de renforcer la francophonie dans son sens le plus ouvert, de nouer des alliances industrielles, universitaires, agricoles, de parler aux jeunesses africaines sans leur faire la morale.

Le changement de visages dans les ambassades doit s’accompagner d’un changement de ton et de posture. C’est tout l’enjeu du moment : transformer un retrait en refondation, un repli en relance.

L’Afrique n’attend plus la France. Mais elle pourrait encore l’écouter.

La question n’est pas de savoir si l’Afrique a tourné la page de la relation spéciale avec Paris. Elle l’a fait. La vraie question est celle-ci : la France peut-elle, dans un monde multipolaire, redevenir un acteur crédible et respecté sur un continent qui représente l’avenir géopolitique et démographique de la planète ? Si elle le veut vraiment, la réponse est oui. Mais cela passe par la fin des illusions.

Pour l’heure, l’histoire ne rejette pas la France. Mais elle l’interroge sévèrement…

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